Le nombre de chômeurs a augmenté de 3 % sur l'année 2010, ce malgré toutes les rodomontades et autres lénifiantes déclarations du pouvoir et de certains articles d'analystes (faussement) bien naïfs.
Fallait-il s'attendre à autre chose ? Hélas non.
Cette hausse est en partie conjoncturelle, la crise bien sûr, mais aussi fortement fondée sur une dérive kilométrique de la gestion des entreprises et de la mise en place de certains cadres normatifs.
Dérive de la gestion des entreprises : depuis le début des années 90 on assiste à une modélisation financière de ce qui doit être, ne peut être qu'un outil de production de richesses au sens large. Richesses économiques certes mais aussi richesse sociale : formation, évolution de carrière, salaires décents.
L'entreprise n'est aujourd'hui considérée, pour leur grande majorité, que comme "centres de profits". Combien la valorise-t'on sur les marchés boursiers: afin de rendre le "produit" le plus attractif possible pour les actionnaires, les investisseurs financiers.
L'entreprise n'est plus ou presque plus considérée comme une valeur industrielle mais comme une multitude de titres à la valeur fluctuante et volatile, sans frontières.
Dans ce schéma-là, dans des marchés la plupart du temps saturés et très concurrentiels , la progression du chiffre d'affaires est difficile, sinon par des rachats successifs, générateurs d'endettement. Le "règlage" (le mot est odieux mais c'est bien de cela qu'il s'agit) le plus simple est de jouer sur la masse salariale.
Augmentations saupoudrages, il faut bien maintenir ses marges, précarité (CDD, intérim) , embauches sans augmentation des effectifs (un départ n'est que rarement remplacé).
Ajoutons que cette conception purement financière de l'entreprise favorise toutes les formes de délocalisations, d'externalisations de sous-traitance.
Les entreprises sont friandes d'experts en gestion internes ou externes (consultants qui font florès) : pour une gestion au plus serré des frais de fonctionnement, "améliorer le bas de bilan" comme il se dit.
Friandes d'informaticiens : mettre en place des bases d'informations communes pour mieux délocaliser. Mettre en place des "outils pensants" permettant de remplacer des travaux de première expertise par des bases d'informations "parlantes" : curseurs, graphiques, chiffres-clés.
Au final il faut rendre à l'actionnaire ce qu'il attend. Actionnaire fonds de pensions, actionnaire spéculatif : peu leur importent les considérations sociales que l'entreprise doit à ses salariés.
Comment dans ce cadre-là imaginer diminuer, au minimum juguler la montée du chômage ?
Les cadres normatifs, comme la rupture conventionnelle sont de véritables appels d'air vers le Pôle Emploi. Ce point a déjà été maintes fois évoqué.
Mais au-delà des conséquences "mécaniques", il y a une vraie conséquence sociale dans la gestion des ressources humaines des entreprises .
Cette conséquence est une plus grande opacité encore des relations entre salariés et direction, entre salariés eux-mêmes, déjà fortement isolés et individualisés par une batterie de mesures dites de management personnalisé, au "mérite", qui ne sont dans la plupart des cas, que manipulatoires.
Le fait de pouvoir toucher un pécule et de garder ses droits aux Assedics, est un argument fort pour faire miroiter au salarié un rebond en toute sécurité. Rebond qui ne vient souvent jamais. La mise à l'écart d'un salarié peut se faire avec beaucoup plus de subtilité. Les pièces sur l'échiquier bougent sans faire de bruit.
Dans ce contexte, comment ne pas soupçonner encore plus les uns et les autres ? Comprendre après coup qu'on a été manipulé, floué et finalement mis à la porte : perte de confiance en soi et fragilisation psychologique qui en découlent ne favorisent en rien le retour à l'emploi.
Retour à l'emploi dans le sas de l'intérim et des CDD...