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Billet de blog 19 avril 2010

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Solutions locales

L'indispensable Stéphane Guillon, ludion matinal, m'enlève le pain de la bouche, si j'ose dire. Dans son billet de mardi dernier sur France inter, ne voilà-t-il pas qu'il nous raconte le rêve (« bizarre », précise-t-il) qu'il a fait la veille : le président français et une partie de son gouvernement se crashant en plein vol en allant à Bruxelles.

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L'indispensable Stéphane Guillon, ludion matinal, m'enlève le pain de la bouche, si j'ose dire. Dans son billet de mardi dernier sur France inter, ne voilà-t-il pas qu'il nous raconte le rêve (« bizarre », précise-t-il) qu'il a fait la veille : le président français et une partie de son gouvernement se crashant en plein vol en allant à Bruxelles. Oui, qui d'entre nous, à la nouvelle de l'hécatombe polonaise, n'a pas imaginé un instant, soyons francs, une situation analogue dans notre pays ? Un vrai faux scénario de politique-fiction : la République décapitée, la Sarkozie orpheline, le pouvoir vacant, la nation sous le choc, une first lady drapée de crêpe noir, façon burqua redessinée par John Galliano, des héritiers et des rivaux qui piaffent, les médias en habits de deuil.

C'est, au demeurant, un autre film (anti) catastrophe qui a retenu cette semaine mon attention : «Solutions locales pour un désordre global » qui traite, entre autres, de la sécurité alimentaire de la planète. Il est signé Coline Serreau, cinéaste en état de résistance et de dissidence depuis des lustres. Qu'on se souvienne de ses comédies grinçantes et utopiques (« Trois hommes et un couffin », « la Crise », « Romuald et Juliette », « la Belle verte »). Cette fois, c'est par les voies du documentaire qu'elle lance un cri d'alarme : pour le respect du biotope et au-delà pour l'avènement d'un autre type de société. Et de nous entraîner tout autour du monde, donnant la parole à ceux et celles qui s'opposent au processus mortel des multinationales de l'agro-alimentaire, affameurs paradoxaux de la planète dont la cupidité et l'aveuglement nous ont mené au bord du gouffre. Paysans, agronomes, bio-chimistes, économistes, philosophes ou militants associatifs - tous gens de conviction et de lumière - ils démontrent, exemples à l'appui et de la façon la plus frappante qui soit, l'aberrante course au profit de l'agriculture intensive, le rapt et le viol de la terre, les sols empoisonnés par les pesticides, épuisés par les engrais et meurtris (qui l'eût cru ?) par les labours. Haro sur le racket organisé des semenciers qui se partagent le marché, en tête desquels, bien sûr, la firme Monsanto - peut-être le nom du diable au début du 21ème siècle ! Tout se tient : paysans pris en otage, chassés de leur terre, poussés à l'exode ou au suicide (comme en Inde), plantes et animaux malades, consommateurs victimes de la « malbouffe ».

Les « solutions locales » de Coline Serreau passent par des initiatives alternatives concrètes, entre autres celle des AMAP ( vente directe du producteur au consommateur), voire par les expériences des Paysans sans Terre au Brésil et la libre circulation des semences.

Au générique de fin, tous les intervenants rient ou sourient devant la caméra, comme soulevés par l'urgence vitale de leur lutte. « L'utopie, disait Théodore Monod, ce n'est pas ce qui est irréalisable, mais irréalisé. »

Utopie ou Sarkozy, il faut savoir choisir. Le noir nuage venu d'Islande nous y invite.

Chronique parue dans la « Charente Libre » samedi 17 avril.


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