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Billet de blog 22 mars 2010

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Déni

«Même pas mal!» Telle est la misérable, la pathétique réponse des petits enfants de la majorité dans la cour de récré de l'entre-deux tours, serrés frileusement derrière leur chef de meute. Ils veulent faire bonne figure dans l'adversité, mais ils ne trompent qu'eux-mêmes. Sourds et aveugles face au message des urnes, ils gesticulent et pérorent, croyant cacher leur désarroi, naufragés d'un tsunami électoral qui les laisse exsangues et groggys, K.O. debout.

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«Même pas mal!» Telle est la misérable, la pathétique réponse des petits enfants de la majorité dans la cour de récré de l'entre-deux tours, serrés frileusement derrière leur chef de meute. Ils veulent faire bonne figure dans l'adversité, mais ils ne trompent qu'eux-mêmes. Sourds et aveugles face au message des urnes, ils gesticulent et pérorent, croyant cacher leur désarroi, naufragés d'un tsunami électoral qui les laisse exsangues et groggys, K.O. debout. Aucune improvisation, comme on sait, dans leurs commentaires servis dès 20 heures, dimanche 14, sur tous les plateaux télé, une fois connues les premières estimations. Au cours d'un briefing tenu à l'Elysée vers 18 heures, en présence du président de la République, ministres, sous-ministres et affidés de l'UMP s'étaient vu délivrer «les éléments de langage» (sic) définis dans l'urgence et la panique. Rien d'autre que la bonne vieille méthode Coué remise au goût (amer) du jour.

Un vote-sanction pour le pouvoir en place? Pas du tout! Une claque magistrale? Que nenni! Et tous en chœur, Fillon, Bertrand, Copé, Yade, Dati, Chatel, Lefebvre et les autres, de reprendre, mot pour mot, le refrain du stratège suprême. Tous comme un seul homme de réciter leur petit catéchisme pitoyable, insulte à l'intelligence des citoyens électeurs. Cela porte un nom en psychanalyse : le déni de la réalité, mécanisme de défense face à une situation traumatisante qui consiste à substituer un monde imaginaire à la réalité qui dérange. L'auto-intoxication plutôt que l'autocritique. Un dessin de Pétillon dans «le Canard enchaîné» dit tout. C'est Fillon, Droopy à la triste figure, qui remarque devant un Sarkozy furibard: «Il faudrait quand même garder un peu de réserve de mauvaise foi pour le soir du deuxième tour...»

Demain dimanche, je serai comme vous devant ma télé, à zapper entre les chaînes –TF 1, France 2, France 3, LCI, i-télé, BFM, Direct 8, LCP– pour suivre à chaud les résultats, les commentaires et les débats. En ai-je connu des soirées électorales depuis mon adolescence. Je ne les compte plus. La première dont je me souviens est celle de la présidentielle de 1965 qui vit François Mitterrand mettre le général De Gaulle en ballottage. Les autres candidats s'appelaient Jean Lecanuet, Pierre Marcilhacy, Jean-Louis Tixier-Vignancour et Marcel Barbu. C'était au temps de l'ORTF, chaîne unique en noir et blanc dans des décors austères. Excitation, attente, émotion, comme à l'arrivée d'une étape du Tour de France. En 1969, c'est en couleur sur la Une comme sur Antenne 2 que se profilait sombrement la victoire annoncée de Georges Pompidou. En 1974, Mitterrand devançait Giscard au premier tour. En 1981, je n'étais pas devant mon poste, mais place de la Bastille pour vivre l'événement historique dans la liesse populaire.

Attention quand même : abstention, piège à cons !

Chronique parue dans la « Charente Libre » le 20 mars.


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