Si, depuis une quinzaine d’années, le navire France prend de la gîte, son possible naufrage ne date pas d’hier. Comme il en est pour tout individu, sans doute faudrait-il remonter à sa venue au monde, consulter un psychanalyste, mais n’allons pas si loin. Contentons-nous d’examiner la France républicaine.
En 1789, à deux doigts de l’apparition de la machine à vapeur, le peuple français se délivrait de la monarchie. Trois ans plus tard, il décapitait son roi — entendez qu’il tuait le père et, accompagné de cette magnifique devise : Liberté, Égalité, Fraternité, qu’il entrait de plein pied dans son adolescence.
Hélas, il n’était pas assez responsable pour se débrouiller seul. Si bien qu’il dût lutter durant plus d’un siècle avec une partie de lui-même demeurée monarchiste. Et qu’aujourd’hui encore, il est à la recherche d’une figure qui puisse remplacer la figure paternelle. Ainsi, pendant que se formait une nouvelle d’aristocratie, représentée par les chevaliers de l’industrie, leurs vassaux et les barons de la finance, le peuple français reconstituait un trône. Il y portait successivement des empereurs, puis de hauts personnages sensés le protéger. Entendez les Pétain, de Gaulle, Mitterrand et Chirac, enfin ce brave M. Hollande, dont l’aspect bonhomme joua sans doute un rôle dans la victoire qu’il remporta sur Nicolas Sarkozy quant à lui inquiétant. Quoi qu’il en soit, les termes de trône et de monarque (républicains) entrant dans le dictionnaire, les esprits s’éloignant donc des fondements de la République, on peut prévoir la fin prochaine du régime instauré par le général de Gaulle, autrement dit notre passage de l’adolescence à la maturité.
Cependant, la Droite comme la Gauche (l’une demeurée sous la coupe d’un grand homme qui n’est plus, l’autre s’attardant dans les balbutiements d’un socialisme utopique qu’elle se refuse à faire évoluer autrement que par le Marché, sont incapables de désigner d’autres objectifs que l’ombre de leurs clochers. Restent l’extrême droite de Marine Le Pen et la gauche de la gauche de… de Mélenchon et son PG ? de Besancenot et de son NPA ? de Larrouturou et de sa Nouvelle Donne ? de Duflot et de ses écologistes ? de Nikonoff et de son M’pep ?… — soit d’une part une gauche de la gauche pagailleuse, errant à la recherche d’un leader auquel son inconscient se refuse, et d’autre part une extrême droite organisée, qui n’aura ce chance que provisoirement : l’Histoire lui fit appel à maintes reprises avec les résultats qu’on sait.
Dans cet imbroglio, il faut cependant réaliser qu’un nouveau paramètre vient de faire son apparition.
L’outil informatique, prolongement de notre cerveau, révolutionne déjà la société de la même manière que la machine à vapeur d’autrefois. Et si le remplacement de la main par la bielle engendra le capitalisme, dont il faut reconnaître qu’il favorisa le développement matériel, l’apparition de l’ordinateur offre à l’humanité deux directions possibles : son asservissement à l’automatisme d’une part, d’autre part sa possible émancipation par le développement de ses facultés cérébrales. Là se situe le dilemme, non encore résolu, devant lequel l’humanité hésite
Si la France, principalement pour cette raison, ne se porte pas très bien, n’en est-il pas de même de l’Europe et du monde ? S’impose un changement de paradigme, que rendent indispensable puces et microprocesseurs, et qui devra s’effectuer sous la volonté de l’ensemble des peuples. D’autant que le réchauffement climatique, conséquence d’un matérialisme effréné, les réunira devant des catastrophes climatiques qui déjà se précisent.
À nous d’agir avant qu’inondations, éruptions, famines et choléra ne s’amplifient et ne nous balaient. À nous de choisir entre un Meilleur des Mondes situé à l’opposé des valeurs auxquelles nous aspirons, et une organisation nouvelle dont il va nous falloir, d’un commun accord, déterminer les règles.