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Michel J. Cuny

Ecrivain-éditeur professionnel indépendant depuis 1976. Compagnon de Françoise Petitdemange, elle-même écrivaine-éditrice professionnelle indépendante depuis 1981.

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Billet de blog 4 février 2015

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Pourquoi et comment ils ont tué Muammar Gaddhafi - Série A - numéro 32

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    Notre-Dame l'Europe, mère consolatrice de tous les malheurs qui passent à sa portée

    Sans aucune transition avec les propos massacrants de celui qu'il est possible de considérer comme le principal inculpé du procès engagé à la suite de la contamination par le sida d'une centaine d'enfants libyens dont quelques dizaines ont déjà péri –, le médecin d'origine palestinienne Ashraf Al Hajuj -, le rapporteur de la Commission d'enquête, Axel Poniatowski écrit :
    "D’une catastrophe sanitaire, on est donc rapidement passé pour des raisons tenant à la situation intérieure libyenne et à son exclusion de la communauté internationale, à une affaire politique au prix d’une injustice intolérable aux yeux des pays occidentaux et plus particulièrement de l’Union européenne."

    Or, Ashraf Al Hajuj vient tout juste d'éreinter la Libye de Muammar Gaddhafi... De sorte que c'est la corruption partout présente dans ce pays qui en définirait désormais la situation intérieure, tandis que l'embargo dont nous avons pu découvrir, grâce à Françoise Petitdemange, qu'il s'insérait dans une politique d'agression menée depuis des décennies par les Etats-Unis contre un pays qui avait réussi à se débarrasser de l'impérialisme occidental dès 1969, serait le fait d'une unanimité internationale, quand, en réalité, il avait été imposé par le Conseil de Sécurité agissant sur les seuls documents prétendument détenus par les États-Unis, le Royaume-Uni et la France, ce qui n'est toujours que la même "communauté internationale" qui usurpe en permanence un titre qui ne peut pas être le sien... C'est le moins qu'on puisse en dire.

    Et voici que l'Union européenne se mêle à son tour de ces affaires : pour quelle raison ?

    C'est l'Axel qui va nous le dire, mais auparavant, il lui faut introduire un petit bémol :
    "Ce n’est que progressivement que le sort tragique des otages sera connu de l’opinion publique occidentale."
    Car il est bien entendu que les infirmières et le médecin ne sont que des "otages"... Ce qui explique sans doute l'intérêt que leur portera l'Europe, un peu plus de... cinq ans après leur arrestation (9 février 1999)... Voyons cela :
    "Un tournant va s’opérer au cours de l’année 2004. À cette date, l’Union européenne décide en octobre la levée de l’embargo contre la Libye, ouvrant la voie à une normalisation des relations avec ce pays."

    En fait, l'Europe ne faisait ici que s'aligner avec retard sur... le Conseil de sécurité qui, dès le 12 septembre 2003, ainsi que Françoise Petitdemange le rappelle à la page 412 de "La Libye révolutionnaire dans le monde (1969-2011)" "vote la levée des sanctions politiques, économiques et militaires contre la Libye. La France et les États-Unis se sont réfugié(e)s dans l'abstention. Mais la Libye étant occupée à poursuivre le développement de ses infrastructures, l'Italie, l'Espagne et, bien sûr, la France ont eu intérêt à voir tomber les barrières qui restaient."

    Pour prendre connaissance des raisons qui étaient à l'origine du changement global d'attitude des Occidentaux, il suffira de consulter le même ouvrage.

    Reprenons la suite du propos d'Axel Poniatowski, rapporteur :
    "L’Europe s’élargit en mai à dix nouveaux pays membres que la Bulgarie doit officiellement rejoindre en 2007."

    Mais oui, c'est bien sûr... La Bulgarie, d'où sont issues les six infirmières !... Je vous assure, mon cher cousin, que vous avez dit "bizarre" !... Et pourquoi ne pas déployer devant elle le tapis rouge de la bienvenue à ses martyrs ? Ne sera-ce pas une bonne façon de convaincre sa population – si pauvre, et si bien frappée de plein fouet par les conséquences de l'implosion de l'U.R.S.S. - des moeurs délicates qui sont celles par lesquelles l'Europe se signale ? La population de celle-ci ne dédaignera d'ailleurs pas de se prendre de sympathie pour une cause qu'avec un peu de peinture on pourra lui présenter sous les aspects les plus accordés à son goût pour tout ce qui fleure bon le pipeau ?...

    2004 est donc la grande année. La manoeuvre est au point. Et aussitôt elle va produire de la chaleur humaine à bon compte. Même les martyrs l'auront senti venir à l'instant même :
    "Les personnels soignants ont confirmé que l’année 2004 avait constitué pour eux une nouvelle étape."

    Mais c'est bientôt un véritable tsunami, qui fait particulièrement plaisir à voir :
    "Au cours de leur audition par la commission d’enquête, les infirmières bulgares et le médecin d’origine palestinienne ont expliqué avoir commencé à recevoir des visites à partir de 2004. Ils ont confié que les personnes qui leur avaient le plus souvent rendu visite étaient le représentant de l’Union européenne auprès de Tripoli, M. Marc Pierini, ainsi que les ambassadeurs de France, de Grande-Bretagne et de Chypre. En 2005, ils ont reçu la visite de M. Philippe Douste-Blazy, ministre français des affaires étrangères, puis de Mme Benita Ferrero-Waldner, commissaire européen chargée des relations extérieures."

    La ficelle tirée par les élites politiques européennes est elle-même très grosse, et se manifeste aussitôt chez le bon Poniatowski :
    "A partir de 2004, le sort des condamnés bulgares interpelle désormais les responsables des Etats européens et de l’Union européenne qui entendent intervenir à la fois pour aider les familles des victimes de la maladie, pour contribuer à l’amélioration du système de soins libyen, et pour faire cesser une injustice intolérable."

    Eh oui, nous sommes comme ça, nous autres, Européens ! C'est plus fort que nous ! L'injustice est notre croix...

(référence permanente à propos de la Libye de Muammar Gaddhafi : http://www.francoisepetitdemange.sitew.fr)

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