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Michel J. Cuny

Ecrivain-éditeur professionnel indépendant depuis 1976. Compagnon de Françoise Petitdemange, elle-même écrivaine-éditrice professionnelle indépendante depuis 1981.

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Billet de blog 10 mars 2015

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Pourquoi et comment ils ont tué Muammar Gaddhafi - Série A - numéro 44

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    150 millions d’euros par jour…

    Nous avions donc cru voir réapparaître l’indemnisation… Mais, ainsi que nous le révèle maintenant Axel Poniatowski, il s’agissait d’une formule seulement inscrite dans la “feuille de route” présentée par le fils du colonel Kadhafi, Seif El-Islam… Or, en ce qui la concerne, affirme le rapporteur, l’Union européenne
    "ne pouvait accepter – et n’a pas accepté – d’indemniser les familles pour une faute commise par l’Etat libyen."

    L’os est donc bien toujours là. Et, comme on le constate, il est toujours aussi bien maquillé. Il n’a en effet jamais été question de voir l’Europe payer pour une faute libyenne, mais pour une faute “occidentale” dont la nature n’est pas, pour l’instant, précisée.

    Mais, arrivée ici, l’Europe se bat de pied ferme :
   "Mme Ferrero-Waldner a organisé deux réunions au sujet de cette « feuille de route » : le 22 février, avec le groupe intergouvernemental de négociation élargi à la France et à Malte ; le 12 avril, avec M. Seif El-Islam Kadhafi."

    Cela ne suffisant pas :
    "Le 10 mai 2007, s’est tenue à Bruxelles une réunion à l’invitation de Mme Benita Ferrero-Waldner, à laquelle ont participé le groupe intergouvernemental de négociation (avec la France et Malte), le conseil d’administration du Fonds international de Benghazi, des représentants du gouvernement libyen et des familles de victimes."

    Cette fois-ci, il paraît y avoir enfin un résultat, nous dit Axel Poniatowski :
    "La décision la plus importante a été la garantie apportée par l’Union européenne de poursuivre la coopération médicale avec le centre de Benghazi pour les maladies infectieuses, ce qui représentait une somme de 13 millions d’euros pour une assistance qui représentait six ou sept années de soin."

    Soit une somme annuelle tout ce qu’il y a de plus modique : aux environs de 2 millions d’euros. Il s’agit du fameux versant de… l’aide.

    En soi, dira-t-on, c’est tout de même quelque chose. Or, sans le vouloir, le brave Axel va immédiatement doucher notre optimisme. Certes, "Cette promesse a rassuré les familles libyennes", mais
    "Comme l’a fait observer M. Marc Pierini, «  Les familles, même si elles [étaient] ressortissantes d’un pays extraordinairement riche – les royalties pétrolières atteignent au minimum 150 millions d’euros par jour – étaient néanmoins désespérées parce que si beaucoup d’argent avait été dépensé, il l’avait été de mauvaise manière. »"

    Dans l’immédiat, nous ne comprenons pas très bien pourquoi nous retrouvons ici cette évocation d’un pays pétrolier "extraordinairement riche", et d’une richesse représentant "au minimum 150 millions d’euros par jour". Est-ce le problème ?...

    Oui, bien sûr… Car voici un pays qui est excessivement mal géré. Aussi sa population sait-elle très bien qu’avec 2 millions d’euros par an, l’Union européenne ferait beaucoup plus et beaucoup mieux pour la santé des Libyens qu’un quelconque Kadhafi, père ou fils, avec 150 millions d’euros par jour.

    Mais comment en venir à bout ?... Pour l’heure, il n’est encore question que de rentrer dans les bonnes grâces du peuple libyen. Or, le chemin est toujours le même, et Axel Poniatowski en convient bien volontiers :
    "Si la coopération médicale était acquise, la question de l’indemnisation des familles n’était cependant toujours pas résolue."

    Remarquons une nouvelle fois que, quelques lignes plus haut, le rapporteur avait encore juré ses grands dieux qu’il n’était absolument pas question, pour l’Union européenne, de payer quoi que ce soit à ce titre-là. Toutefois…
    "Au printemps 2007, le Fonds international de Benghazi avait recueilli 120 millions d’euros de promesses de dons, une somme très éloignée des 460 millions de dollars réclamés par les familles. Ces 120 millions étaient principalement constitués de 44 millions d’euros promis par la Bulgarie au titre de l’annulation de la dette libyenne à son égard et de 74 millions d’euros promis à un moment par la Libye, mais « qui se sont évanouis plus tard dans les discussions », d’après les déclarations de M. Marc Pierini devant la commission d’enquête."

    À cet endroit, nous constatons que la somme à trouver est bien de 460 millions de dollars… et que l’Union européenne ne paraît pas y figurer pour le moindre centime. Cependant, la Libye, elle, se comporte, une nouvelle fois, très mal. C’est elle qui fait des promesses…, et c’est elle qui ne paie pas…. Alors que, chaque jour qui passe, elle ramasse 150 millions d’euros à ne pratiquement rien faire…

    On sent que tout cela énerve le bon Poniatowski… Et cela nous énerve, nous aussi. C’est d’ailleurs fait pour cela… Et en raison de quoi ? De quelques dizaines d’enfants libyens morts, de quelques centaines d’autres malades à vie du sida… Mais des filles et fils de riches !... Tandis que l’Union européenne peine à rassembler quelques sous pour les aider… Quel gâchis !

    Et soudain, Axel lâche tout le lest. Pour le voir, il faut aller jusqu’au bout du paragraphe :
    "Les négociations sur l’indemnisation se déroulaient en fait dans un contexte plus large, la Libye se servant des infirmières et du médecin comme d’un levier pour satisfaire ses demandes politiques, notamment le contenu du futur accord de coopération entre elle et l’Union européenne. Les discussions ont donc été à nouveau ralenties. Il est apparu, tout au long des mois de juin et de juillet 2007, que la conclusion de cet accord était fondamentale pour les autorités libyennes, de même que la signature d’accords bilatéraux notamment avec la France, avec laquelle des négociations s’étaient ouvertes depuis l’accession à la présidence de la République de M. Nicolas Sarkozy."

    Rappelons l’intitulé de la confrérie pour le compte de laquelle notre rapporteur se démène si bravement et au péril de son éventuelle réputation d’honnête homme :
    "Commission d’Enquête sur les conditions de libération des infirmières et du médecin bulgares détenus en Libye et sur les récents accords franco-libyens."

    Remember : 150 millions d’euros par jour… Nicolas Sarkozy...

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