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Michel J. Cuny

Ecrivain-éditeur professionnel indépendant depuis 1976. Compagnon de Françoise Petitdemange, elle-même écrivaine-éditrice professionnelle indépendante depuis 1981.

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Billet de blog 17 janvier 2015

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Pourquoi et comment ils ont tué Muammar Gaddhafi - Série A - numéro 20

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    Des aveux qui ne nous "regardent pas"

    Après que, selon ce que nous en a dit Axel Poniatowski, la Commission d'enquête ait décidé de ne surtout pas interroger le médecin et les infirmières sur les tortures qu'il-elles avaient eu à subir, nous apprenons que, dans un entretien avec Human Rights Watch, ces cinq martyrs de la férocité libyenne ont eu l'occasion de faire quelques révélations plus que surprenantes...
    "Mme Siropulo a déclaré : « J’ai avoué sous la torture à l’électricité. Ils disposaient des petits câbles sur mes doigts de pied et sur mes pouces. »"

    Cette fois, c'est bien à nous que l'électrochoc est infligé ! Madame Siropulo avoue ici avoir avoué...

    Avoué quoi, je vous le demande. Qu'aurait-elle pu avouer, puisque, comme le professeur Montagnier nous l'a dit ("je le jure !") : il est démontré, de science certaine, qu'il n'y avait absolument rien à avouer ?

    Certes, elle a avoué que, dès sa venue à l'hôpital de Benghazi, il y avait de la saleté, des seringues utilisées en dépit du bon sens... S'agit-il, là, d'un aveu ? Non, bien sûr : rien que d'un témoignage. Pas de quoi fouetter un chat. En tant que salariée, qu'y pouvait-elle ?

    Au surplus, faudrait-il recourir à l'électricité pour obtenir pareille information ? Tout le monde le savait sans doute, dans l'hôpital, dans la ville et dans les environs, et les enfants contaminés et leurs familles l'avaient certainement vu, de leurs yeux vu...

    Pas besoin d'électricité.

    Nous sommes donc aux abois : Qu'a donc bien pu avouer madame Siropulo ? Qu'elle avait été torturée ? Il aura fallu la torturer pour lui faire avouer qu'elle avait été torturée ?

    Evidemment, si nous songeons une seule seconde qu'elle était coincée par le dictateur et barbare Kadhafi, tout est possible...

    Mais, laissons-là ces tortures terribles que la Commission d'enquête a bien fait de ne pas faire remettre sur le tapis... Posons plutôt cette question : Axel n'aurait-il tout de même pas pu demander à madame Siropulo ce qu'il y avait dans ses aveux ?

    Passons à autre chose avec cet autre propos qu'Axel est allé dénicher nous ne savons pas non plus où :
    "Mme Valcheva a expliqué : « Mes aveux étaient entièrement en langue arabe, et non traduits (…) Nous étions prêts à signer n’importe quoi juste pour arrêter la torture. »"

    Ah bon, elle aussi... Avec une torture supplémentaire : elle ne peut même pas savoir ce qui se trouve dans la version en arabe...

    Mais nous, nous ne savons rien de ce qu'aurait pu nous dire la version française... et Axel s'en fout !

    Et en plus, il nous inflige une parenthèse avec points de suspension qui pourrait bien correspondre à... rien sans doute. C'est peut-être qu'il ne s'en fout pas autant qu'il y paraît, allez savoir !...

    Bon, à qui le tour ?
    "Mme Dimitrova a témoigné avoir eu les mains attachées dans le dos et avoir été suspendue par ses tortionnaires à une porte afin de lui disloquer les épaules."

    C'est déjà plus concret. Nous serions tout de même tentés de demander si, dans son cas, il y a eu des aveux, pas tant pour le cas où elle aurait avoué (c'est très excusable, vu la torture) que pour le contenu de ses aveux... Et peut-être pour ce qui va toujours avec les aveux : le récit des circonstances entourant l'avant, le pendant et l'après de ce qui est avoué... un forfait quelconque, généralement. Oui, avec une seringue, j'ai... Halte-là s'écrie la science occidentale (Montagnier, dans le texte).

    Mais déjà le très peu curieux Axel arrive avec la quatrième pièce à conviction : ce n'est pas la plus silencieuse...
    "Le docteur Ashraf Al Hajuj a ajouté : « Ils ont utilisé les chocs électriques, les drogues, les corrections, les chiens de police et la privation de sommeil (…) Se confesser était comme un examen à choix multiples, et quand je donnais une mauvaise réponse, ils me choquaient.»"
    Celui-là, on le sent très volubile. Les parenthèses-points-de-suspension pourraient très bien dissimuler un véritable roman. On voit l'intérêt des tortures : elles ne servent strictement à rien. Ou bien faut-il prendre les tortionnaires eux-mêmes pour des abrutis ? S'ils savent ce qu'ils doivent faire avouer, qu'ont-ils besoin de torturer tant que la bonne réponse n'est pas là ? Quand elle n'est pas là, elle y est déjà. Ils l'ont apportée eux-mêmes.

    Quoi qu'il en soit, une question se pose : le docteur Ashraf Al Hajuj s'est-il confessé ? Et pour dire quoi ? Mais Axel est encore et toujours aux abonnés absents.

    À suivre...

(référence permanente à propos de la Libye de Muammar Gaddhafi : http://www.francoisepetitdemange.sitew.fr)

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