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Michel J. Cuny

Ecrivain-éditeur professionnel indépendant depuis 1976. Compagnon de Françoise Petitdemange, elle-même écrivaine-éditrice professionnelle indépendante depuis 1981.

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Billet de blog 20 mars 2015

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De Gaulle et le gaullisme "historique" : ce cancer qui nous ronge (LVIII)

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    Le rapport de force sous-jacent à l’exercice futur de la souveraineté

    Reprenons la lettre de Charles De Gaulle à l’amiral Muselier :
    "Vous justifiez vos prétentions en alléguant, d’une part des difficultés éventuelles avec nos alliés britanniques, d’autre part les tendances démocratiques de notre pays, comme si ces difficultés éventuelles ne pouvaient être résolues, ni ces tendances démocratiques satisfaites sans la prééminence de l’amiral Muselier et la présence du capitaine de vaisseau Moret et de M. Labarthe dans le Comité."

    Et voilà bien le dictateur :
    "J’attendrai votre réponse jusqu’à demain 24 septembre à 16 heures. Passé ce délai, je prendrai les mesures nécessaires pour que vous soyez mis hors d’état de nuire et que votre conduite soit publiquement connue, c’est-à-dire stigmatisée." (Lettres, pages 71)

    … hors d’état de nuireJean Moulin, m’entends-tu ?... demande un écho lointain…

    Car, le même jour, Charles De Gaulle va donner une conférence de presse à Londres. Il y sera question, justement, de la souveraineté dont il faut rappeler, dès maintenant, qu’elle était partie intrinsèque du Conseil de la Résistance réuni et présidé par Jean Moulin le 27 mai 1943, vingt-cinq jours avant son arrestation (21 juin 1943). Voici en quels termes De Gaulle présente l’objectif qui est le sien, en montrant bien que, pour lui, la question militaire n’est vraiment pas déterminante :
    "À partir de maintenant, il ne faut pas seulement que la France Libre se contente de combattre l’ennemi commun par les armes dont elle dispose, il faut encore qu’elle s’organise de manière à représenter une nation qui n'a pas d’autre moyen que la France Libre pour faire valoir sa volonté, pour soutenir ses intérêts au-dehors, et enfin pour préparer demain le cadre dans lequel il sera possible d’exercer la souveraineté nationale." (Lettres, III, page 73)

    Mais le général De Gaulle, qui vient, le jour même, de menacer l’amiral Muselier de le mettre hors d’état de nuire, sait qu’il lui faut user, devant le public britannique, et indirectement américain, d’un minimum de prudence. Se rangeant parmi les anonymes de la France Libre, il affirme donc :
    "Nous sommes obligés, puisque aucune expression de la souveraineté nationale n’existe en France actuellement [ce qui deviendra faux à compter de la première réunion du Conseil de la Résistance, le 27 mai 1943], d’improviser une autorité de fait que nous détenons comme gérants du patrimoine national et comme gérants provisoires." (Lettres, III, page 74)

    Et voici maintenant la promesse que Charles De Gaulle aurait dû tenir au bénéfice du Conseil National de la Résistance, non seulement du vivant de Jean Moulin, mais jusqu’au jour même où, la Libération effectuée, il aurait dû lui remettre tous ses pouvoirs en rendant compte, devant lui, de l’usage qu’il en avait fait :
    "Nous avons déjà dit solennellement, et je tiens à le répéter, que cette autorité nous la tenons pour ce qu’elle est, c’est-à-dire, une sorte de délégation de l’intérêt national, autorité que nous exercerons provisoirement et que nous remettrons à la représentation nationale dès qu’il aura été possible d’en constituer une librement." (Lettres, III, page 74)

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