Nous savons ce que nous savons, et que…
Jeanne d’Arc avait ses voix dans le ciel, Charles De Gaulle a ses antennes partout, de sorte qu’il sait tout de ce qui se passe en France, même ce qui ne s’y passe pas…
Les personnes rassemblées au Kingsway Hall de Londres, le 1er mars 1941 auraient eu toutes les peines du monde de lui opposer quelque argument que ce soit, tant ses propos étaient absurdes, et donc non susceptibles d’être soumis à la moindre contre-épreuve. Il n’y avait qu’à le laisser dire… comme il aura fallu laisser dire la brave Jeanne :
"[…] dans toutes les villes, tous les bourgs, tous les villages, elle [la nation française] tisse le réseau secret de sa résistance. Nous savons ce que l’on pense et ce que l’on dit dans nos maisons, nos écoles, nos ateliers, nos marchés. Nous savons quels insignes se cachent sur les poitrines. Nous savons quels écrits circulent de main en main. Nous savons quelles inscriptions s’étalent sur les murs." (Discours, page 70)
Un mois plus tard, Charles De Gaulle est en Égypte. Nous le retrouvons à l’Ewart Memorial Hall du Caire, le 5 avril 1941. Il commence par se faire des compliments à lui-même, et il enchaîne sur les fantasmagories que nous commençons à lui bien connaître :
"Nous avons constitué un faisceau de forces françaises qui a déjà prouvé sa valeur et son désintéressement. Ah ! la France a très bien senti tout cela ; la France a choisi comme nous. Nous en avons la preuve et le témoignage par ce que nous disent ces jeunes gens qui, aux prises avec les pires difficultés, viennent se rallier à nous. Nous savons quels sont les insignes qui se cachent sur leurs poitrines, nous savons quelles sont les inscriptions écrites sur les murs et quelle est la radio écoutée chaque soir avec passion. Nous savons que le 1er janvier dernier, l’immense majorité des Français a fait ce que nous avons demandé, laissant vides les rues de nos villes et de nos villages pendant l’heure d’espérance." (Lettres, page 291)
Le lendemain, 6 avril 1941, Charles De Gaulle est à Alexandrie où se sont réunis des Français libres. Il y repique effrontément :
"[…] si l’on se figure que nous n’avons pas avec la France mille communications, mille liens nous y rattachant, mille jeunes qui arrivent jour après jour, et qui après mille difficultés viennent se joindre à nous ; mille liens, mille indices nous prouvent que ce sont nos insignes que l’on porte en France sur toutes les poitrines, que l’on se passe de main en main, et que c’est la croix de Lorraine qui s’étale partout sur les murs. C’est le 1er janvier dernier que nous avons demandé à la nation française de manifester d’une façon muette son désir de chasser l’ennemi." (Lettres, page 294)
C’est ici qu’il faut se tourner vers cette réflexion qu’a faite l’un de ceux qui se sont trouvés à Londres parmi les collaborateurs les plus proches de De Gaulle, Jean-Louis Crémieux-Brilhac, dans la Préface qu’il a rédigée pour Les Voix de la Liberté – Ici, Londres – 1940-1944 ( La Documentation française 1975, page XIII) :
"Comment ne pas s’interroger aussi sur ce qu’auraient été, sans la radio, le prestige et l’action même du général De Gaulle, l’union entre la France Combattante de l’extérieur et la Résistance intérieure ? Car la dimension légendaire de l’appel du 18 juin nous dissimule la singularité sans précédent d’un acte radiophonique à l’état pur : pour la première fois dans l’histoire, un héros national se sera fait connaître - et reconnaître – par le seul moyen de la radiophonie, de toute une nation qui ne l’avait jamais vu."
Et on voit à partir de quels bobards !