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Billet de blog 14 février 2015

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Dette (s) III

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L’uniformisation du concept de la dette implique l’uniformisation de l’œcoumène. Dans un monde qui se pense global, la seule dette qui existe (et se comptabilise) est celle contractée envers le marché. Les sordides et bien connus plans d’ajustement structurel, qui furent le fossoyeur des économies diversifiées du Tiers Monde et plus particulièrement de l’Afrique, suivis de l’intégration de ces espaces à l’économie - et  aux seuls besoins - des créditeurs occidentaux à travers l’OMC, tuèrent toute autonomie et liberté d’action aux économies périphériques. Sous le nom de « restructuration » on déstructura tout ce qui existait encore comme mécanique pragmatique ou comme innovation autonome, au nom de l’efficacité économique. Les cultures vivrières fondirent comme une peau de chagrin, les échanges traditionnels transrégionaux ou transfrontaliers de l’économie de subsistance disparurent, les monocultures, héritage des temps des colonies, se renforcèrent, des espaces agricoles (et ceux qui les occupaient) furent spoliés par les multinationales agricoles, enlevant toute flexibilité rationnelle et saisonnière  à l’occupation des sols. En conséquence, la crise s’installa, suivant de près les aléas des besoins des économies intégrées des pays conquérants, et pour y répondre, le sud emprunta, sous la forme d’une aide des institutions transnationales (Banque Mondiale FMI). A ces prêts  on donna, sans humour, le nom de plans structurels de développement. Lesquels ne structuraient que la modalité de la dette perpétuelle et les réformes obligatoires qui y étaient liés.  

Inutile de dire que ces échanges étaient inégaux, que les seuls qui en profitaient (et continuent à le faire) sont les prédateurs internationaux ou compradores, ce qui, entre autres, perpétue la corruption et les castes des cleptocrates locaux,  tuant dans l’œuf toute velléité démocratique.

Les prédateurs de « là bas » étant les  créanciers  « d’ici ». Hommes d’affaires d’ici et potentats de là bas accumulant des richesses jamais autant concentrées tout au long de l’histoire de l’humanité,  les peuples et les Etats étant priés de s’endetter à leur place. Aux prédateurs historiques s’étant joint ceux des BRICS, qui ne sont pas plus tendres avec leurs victimes, loin de là.

Contrairement à ce qui est véhiculé par les médias (possédés, eux aussi, par ces prédateurs - hommes d’affaires bien connus sous le nom de nouveaux milliardaires) la situation en Afrique, tout naturellement, se dégrada.  Sauf si on peut considérer comme  succes story  la peste à Madagascar, les émeutes au Kenya, le Ebola au Libéria, les farces électorales  en Côte d’Ivoire, Boko Haram au Nigeria, la famine aux deux Soudans, les dictatures et autres systèmes autoritaires un peu partout, les dérives fondamentalistes sahariennes et sahéliennes, la perpétuation dynastique des « sauveurs institutionnels » au Tchad ou aux deux Congos, les seigneurs de la guerre et autres groupes manipulés dans la région des lacs par l’Ouganda, les guerres civilo - ethniques au Centre-Afrique, l’Etat fictif en Somalie, la piraterie au golfe de Guinée, etc.  

Bien sûr, on pourra toujours rétorquer qu’au sein de cette entropie polymorphe les ports exportateurs se portent très bien, les entreprises d’extraction de matières premières se portent elles aussi à merveille, que les terres confisquées produisent de la canne sucre, des fleurs, des haricots, des céréales sans encombre, mais c’est bien là le problème : on est revenus, à pas de géant aux comptoirs d’antan, exploitant l’espace utile et « délaissant » l’espace réel et ceux qui l’habitent

A propos, les milliards pour les « Rafale », achetés par la dictature Egyptienne, qui va les payer ?

Les non - Etats de Libye, de l’Iraq et de la Syrie à qui vendent-ils leur pétrole, et à quel prix ?

Si ces pays ne sont pas dans la « bonne voie », par contre leurs matières premières connaissent parfaitement le chemin… 

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