Ils vont faire de la France un Liban. Voilà donc à quoi se résume l’arsenal idéologique d’une ex ministre sarkozyste. Aussi spontanée que ridicule, cette saillie surréaliste indique à quel point la droite parlementaire française vient d’atteindre le degré zéro de l’entendement. Il est même soupçonnable que la dite ministre, pas des plus futées du gouvernement sortant, croie vraiment à ce qu’elle dit. En ce sens elle est moins à blâmer que bien d’autres qui, faute de pouvoir dire quoi que ce soit de cohérent, on fait le choix de dire des énormités similaires, sans évidemment y croire un mot ou d’autres qui comparent leur probable bérézina à fin du monde et du temps.
Ces tirades cataclysmiques, ordurières, inélégantes, qui usent du mensonge comme d’un stratagème, pourraient participer à une farce égayant le poulailler d’une pièce de Vaudeville si elles ne travaillaient pas l’esprit d’une partie non négligeable de la population française. Car celle-ci semble prendre au sérieux ces énormités cauchemardesques, approuver leur veulerie, applaudir leur grossièreté, ouvrir des cuisses consentantes à ces mensonges. Encore dit-elle, encore ! Faites-moi peur, oui, oui !
Ce délabrement de l’intéligence, cette attraction cauchemardesque à tout discours de catastrophisme, à toute parole qui défigure, noircit, caricature et condamne les autres qui soient-ils, qui transforme une élection en un champ de bataille où se joue - excusez du peu - le sort de l’humanité, cette stratégie de la tension déplorable, se concluront demain par un sentiment absurde et cependant durable : les barbares ont pris la France.
La digue qui séparait la droite parlementaire du FN, n’avait pas été construite pour séparer les « hommes de bonne volonté » des ultras. Elle était là pour partager raison et hystérie, entendement et panique, rationalité et frustration. Elle était là pour préserver un monde pensant qui ne s’abandonne pas à ses pulsions les plus basses, les plus veules, les plus autodestructrices, hélas présentes en chacun de nous. Il ne s’agissait pas d’un conflit idéologique, mais de la préservation d’une paix intérieure qui résiste aux peurs et à l’irrationnel qui les accompagne.
Le legs sarkozyste sera dur à porter. Heureusement, une majorité de Français s’apprête à refuser cet héritage empoisonné, pour son bien, pour celui de la France, mais surtout pour le bien de tous ceux qui considèrent cette nouvelle majorité comme un monstre sorti des enfers.
Reste à faire le bilan de cette droite « bien pensante » qui, en connaissance de cause, a caressé, choyé, cultivé ces peurs, a démoli les digues séparant raison et déraison. Si on devrait être enclins à pardonner à tous ceux qui ne savent pas ce qu’ils font, à ces folkloriques personnages qui croient en leur rôle, il en sera bien autrement pour tous ceux ayant sacrifié, pour des broutilles, leur intelligence.