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Billet de blog 17 octobre 2016

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1. La question centrale

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Jouer aux sots est le sport préféré de nos élites politiques, c’est-à-dire de faire semblant de ne rien comprendre en essayant de rabaisser au possible l’entendement commun, afin de mobiliser les citoyens pour des sujets qui  ne sont que marginaux, ou, tout simplement, inexistants. Que ce soit sur des questions de société, du politique, du rôle central que joue aujourd’hui l’aspect financier de l’économie, ou des enjeux géopolitiques et diplomatiques globaux, on esquive, on regarde ailleurs, on clive en simplifiant à l’extrême. Il paraît impossible, par exemple, que Fillon n’aie pas saisi que le mariage pour tous est une affaire pliée,  que Hollande croit toujours à discrétion journalistique ou que Sarkozy est persuadé que l’ensemble des français souffre de la maladie d’Alzheimer.

On a la fausse impression que chez eux le pathos prime sur l’entendement, que le point de fixation l’emporte sur l’analyse, que la gestion de l’espace se résume aux quartiers abandonnés (qu’en passant tous les gouvernements ont bradé soit aux adorateurs d’un dieu dément soit aux voyous, souvent aux deux), que le monde se résume on bons (eux) et mauvais (tous les autres), que les bombes lancées sur Alep sont diaboliques et celles sur Sanaa égarées, etc.  Mais ce n’est pas le cas. Ce sont des commerciaux qui essaient de vendre des produits - de moins en moins vendables -,  sourire aux lèvres, regard volontariste et discours calibré en fonction de ce qu’ils veulent vendre ; Quand le président explique avec ses airs d’ingénue offensée qu’il a « redressé la France », il fait semblant de ne pas comprendre que c’est une affirmation invérifiable, abstraite, et que, même si elle est vraie (ce qui est douteux, puisque ne se redresse qui ce qui est désiré et désirant), il s’est fait élire sur des propositions précises et quantifiables, comme la baisse drastique du chômage, la lutte contre « l’innommable finance » ou le fléchissement de la politique européenne  de rigueur au profit de la relance et de la justice sociale.    

Il est plus que tard pour réintroduire en politique la notion même d’évaluation, de rappeler que l’action est précédée par une réflexion hiérarchisée, que le passé compte, que le futur ne tombe pas du ciel. Sinon ce n’est plus de la politique mais de la religion. Il est donc central d’aller à la source  et de  se demander si la politique, et à fortiori le processus démocratique  sont encore possibles dans des cadres économiques et administratifs qui tournent systématiquement le dos à l’évaluation.

A commencer par celui de l’Europe qui n’a tenu aucune de ses promesses.  Où est donc la croissance, la prospérité, la sécurité, l’emploi, le rôle central de l’Europe dans le monde ?  Si l’Europe est un projet politique elle ne peut pas faire l’économie de ces questions. Mais ci c’est une religion, un mythe, elle peut aller de l’avant, en faisant semblant de ne pas voir, de ne pas entendre et de ne pas comprendre qu’un mythe fondateur existe tant que les hommes y croient. Quand ils n’y croient plus, on peut les accuser d’hérétiques (de populistes on dit aujourd’hui), de mécréants, d’allothrisques ou même de barbares, rien n’y fait si ce n’est que la contestation prend les chemins qu’elle peut. A force de prendre les gens pour des cons, ces derniers agiront comme tels, et c’est pas la peine de jouer à l’étonnement : cela fait près d’un quart de siècle que les élites politiques simplifient, aphorisent, détruisent l’entendement et la pensée avec repoussoirs et épouvantails…      

A suivre   

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