Combien de temps peut survivre une Europe qui agit contre la volonté clairement exprimée de ses citoyens ? Ce n’est pas par ce que ces derniers s’expriment sous des formes hétéroclites et contradictoires que leur opposition n’est pas manifeste. Combien de temps les exécutifs managériaux qui gèrent les pays membre vont survivre à la grogne, le malaise, l’exaspération de leurs propres peuples, très clairement exprimés ? Combien de temps les médias feront-ils diversion impunément, combien de temps ils réussiront à abrutir, à sous - informer, à pointer des sujets futiles, à prendre les citoyens pour des lapins crétins ? Combien de temps les hôtes des parlements et du parlement européen continueront à faire croire qu’ils ont des différences, qu’ils ne se partagent pas en cooptation les privilèges de leurs fonctions, qu’ils ne mènent pas la même politique, transformée en dogme ? Combien de temps l’Eurogroup osera affirmer que sa politique menée par la Troïka est, sinon un succès, une voie obligatoire, un sens unique ?
Pablo Iglesias, le dirigeant des Podemos l’a dit clairement : si vous ne vous entendez pas avec Syriza, vous aurez à faire avec le FN ». Paroles perdues dans des assemblées de gérants has been sourds et aveugles qui essaient de sauver, avec tous les artifices, les abus, les incohérences leur monde fictif, aussi fictif que les milliards du marché qui dansent, en cercle fermé, la farandole. Avec le fanion usurpé de Charlie, l’exécutif français essaie de sauver ses cantons, se lamentant que les oppositions de gauche ne suivent pas aux appels d’une union nationale aussi fictive que bafouée par les procédures parlementaires d’exception. Attention clame le premier ministre, avec le FN vous perdrez les subventions européennes. Il fait écho au premier ministre grec déchu, qui affirmait, lui aussi, que voter Syriza était synonyme de la fin du monde, des subventions, et de la bienveillance des chancelleries européennes. Dans ce monde sous - entendait-il, seuls les collaborateurs, les shootés à l’emprunt, les travaillant le dimanche, les pliant l’échine, aux dictats européens auront une place au soleil. La fédération des nantis espagnols du PSOE et de l’UP, qui ont géré ce pays depuis la chute de Franco, crient la même chose, criant au loup pendant qu’ils égorgent, tel un renard dément, les poules de leurs poulaillers respectifs. Les partis de l’exaspération, du sursaut, de la fierté, les contestataires, ne sont pas des démocrates indique le président de la Commission qui déclare par ailleurs que les élections n’ont rien à voir avec les traités et les accords européens. Ont-elles à voir avec la fraude fiscale et ses facilitateurs dont son duché minuscule est le champion ? Ou croit-il, qu’après Lux Link, il peut faire (et dire) comme si rien n’était ? Que les noms Clearsteam, Adidas, Ikea, Coca-Cola, Dassault, Siemens, Areva, Elf, Dexia, Royal Bank of Scotland, ABN-MRO, HSBC, Deutsche Bank, Bayern de Munich - et j’en passe, sinon il faudra remplir des pages et des pages -, ne disent plus rien aux citoyens, qu’ils ont disparu comme une larme dans la pluie ? Il est décidé, affirme-t-il, de lutter contre la corruption et la fraude fiscale, et, en guise de preuve, il augmente le prix des cigarettes au Luxembourg, siège social des cigarettiers américains qui avaient transformé son pays en paradis pour fumeurs. Mais quand pour la première fois de son histoire, un pays membre de l’UE, la Grèce, s’engage à lutter contre la fraude fiscale, à imposer les grandes fortunes et à lutter contre les trafics, pour l’Allemagne c’est une « farce ». Ce n’est pas là que l’on trouve de l’argent pense-t-elle, c’est en imposant les classes moyennes, les plus démunis, en privatisant bien et services (au profit sans doute de la dite Allemagne), en baissant retraites et salaires (ils nomment cela compétitivité), en cassant les services publics, en paupérisant le système de santé et la sécurité sociale. Il faut expliciter ce que Berlin (et son sous fifre présidant Eurogroup), entendent par « bonne voie ». Et c’est cette voie grande ouverte à l’exaspération, transformée en boulevard, qu’empruntent aujourd’hui les citoyens pour dire un non massif. Dans ce monde irréel et tournant sur lui-même, tous ces eurocrates croient toujours gouverner. En fait, ils ne font que précipiter leur chute. Tous les appels gargarisant à la responsabilité qu’ils lancent, pris pour ce qu’ils sont, des vulgaires appels au loup, n’y changeront rien. Le Monde Diplomatique titrait, concernant la Grèce seule devant les argentiers de l’Eurogroup : 27 assassins de l’espérance. Il a tort, ce n’est pas la Grèce, c’est l’Europe qu’ils assassinent…