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Billet de blog 26 juillet 2013

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3. Le dédale des techniques

Imaginer - et affirmer désirer - un futur radieux, le déconnectant des actions (généralement erronées) quotidiennes que l’on surnomme, pour mieux les déguiser, « réformes », « moyens » ou « mesures », c’est ne rien comprendre a la puissance entropique de la techné.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Imaginer - et affirmer désirer - un futur radieux, le déconnectant des actions (généralement erronées) quotidiennes que l’on surnomme, pour mieux les déguiser, « réformes », « moyens » ou « mesures », c’est ne rien comprendre a la puissance entropique de la techné. De l’art de gouverner, la technostructure au pouvoir n’a retenu que le pire : le but, continue-t-elle a croire, justifie les moyens. Les cohortes de chômeurs se justifient par une sortie du tunnel, dont, précurseur, Giscard d’Estaing « entrevoyait » déjà la sortie. Les technocrates qui nous gouvernent ne s’aperçoivent nullement que comme le dit si justement Bruno Latour, si l’on ne s’aperçoit pas combien l’usage de la technique déplace, traduit, modifie,  infléchit, l’intention initiale, c’est tout simplement parce que l’on a changé de but et que, par un glissement de la volonté, on s’est mis à vouloir autre chose que ce qu’on avait désiré au départ.

Tout projet politique cesse de l’être, se transformant en une combinaison de décisions techniques, complètement déconnectées des notions du bien et du mal, au nom d’un but  idéal phantasmatique qui, bien entendu, ne surviendra jamais. Tout au plus le technocrate au pouvoir, qu’il soit de droite de gauche ou d’ailleurs déclarera, tel le premier ministre grec que pour faire une omelette il faut casser des œufs (sic). C’est en cela que la notion même de sérieux devient apocalyptique (dans les deux sens du terme).  L’inquisition dans son temps (ou les fondamentalistes aujourd’hui) n’agissait pas autrement. La seule différence résidant au fait que leurs techniques ambitionnaient un au-delà paradisiaque, tandis que pour les gouvernants contemporains elles se justifient par un futur d’ici.

Le terme de sérieux devenant ainsi synonyme de totalitaire puisque les moyens cruels utilisés aujourd’hui contre les citoyens sont employés pour leur bien de demain. Ainsi, la technostructure se pourvoit d’une idéologie, c’est à dire d’une vision du monde hermétiquement coupée de la réalité, et incapable de juger son action, puisque celle-ci se dilue dans une série de moyens pensés comme passagers. Cela, en outre, permet d’affirmer que le but réside à se débarrasser de la finance mais que les moyens consistent à ruiner les peuples et les Etats pour continuer, avec sérieux, à emprunter au marché.  

Ainsi, cette incapacité d’anticiper, embourbée dans une diarrhée de mesures dites techniques ne  se met ainsi jamais en cause et se croit  insanctionnable  comme jadis on se croyait infaillible, voir immortel. 

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