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Billet de blog 8 avril 2015

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Edito – Michel Sajn in La Strada N°231

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LA GLACE EST AMERE

La peste brune est devenue très «tendance» cet an-ci. Il semble que le peuple en colère ou effrayé est en train de choisir une représentation violente… Cette montée du populisme n’est-elle pas la conséquence de trop longues années, passées à acculturer notre Pays ? Quand on attaque la Culture, c’est la République qui se meurt !(1)

Il est vrai que toutes les promesse budgétaires en direction de la Culture ont toujours été vaines. Que récemment, un Président un peu trop suractif, et pas très cultivé, a voulu faire des économies en réduisant les moyens de la représentation de la France à l’international, en détruisant son réseau de centres culturels à l’étranger. Accélérant ainsi le déclin de nos valeurs qui reposent non pas sur du nationalisme, qui est plutôt une crispation identitaire, mais sur des valeurs et des idées que l’on nomme la République. Aussi quand certains tenants d’une «éthique bleue marine» se permettent de parler de patriotisme, il faut leur rappeler que le nationalisme et le protectionnisme qu’ils prônent ne peuvent en aucun cas être qualifiés de patriotisme. Ce dernier se définissant uniquement en France par rapport à la République.

Ces «glissements» pervers dans l’emploi des mots qui nomment nos valeurs, les «copier-coller» bien choisis de Jaurès ou de De Gaulle, dans un discours infâme, sont devenus un sport national pour les tenants de cette ligne brutale. Mais s’ils peuvent aussi bien déformer ces idéaux, c’est qu’ils ont des complices : la majorité des grands médias généralistes titrent et se réfèrent de plus en plus à ces gens qui, lorsqu’ils parlent semblent «faire vendre». Nos dirigeants politiques, pour compenser la vacuité de leurs discours, se servent de ce mouvement sombre pour nous forcer à voter par défaut. Nos pseudos «intellectuels» sont bien trop silencieux quand on traite de singes des Ministres de couleur ou quand on menace de mort des citoyens aux mœurs sexuelles alternatives. Ces piliers de débats télévisés sont les nouveaux piliers du «bistrot du commerce» : imprécis, négatifs, immatures… Ils ne proposent rien et semblent en manque de repères, eux qui devraient nous les signaler, puisqu’ils se situent eux aussi par rapport au populisme… Pire encore, des sondages, des dossiers entiers dans les médias stigmatisent les pauvres gens qui se laissent berner par cette vague davantage brune que bleue… marine. «Ce serait donc les moins instruits qui votent pour le populisme» (2) ou pire encore, cerise sur le gâteau : ceux qui se retrouvent bernés par les cocaïnés de la Bourse et donc au chômage ne seraient que des «illettrés». Le garçon se permettant de parler ainsi, même s’il s’est excusé après, n’ayant jamais eu le courage de passer par les fourches caudines de la démocratie et venant du sérail de la banque. Un comble. Tout ce mépris n’aboutira à rien d’autre qu’à accentuer la frustration de ceux qui ne savent pas, qui ne savent plus, que l’on abrutit avec des moyens énormes : les médias, certains nouveaux moyens de communication globale qui dictent leur vindicte, un peu comme les grandes entreprises du GAFA (3). D’ailleurs, pourquoi le net est-il vampirisé par ceux-là même qui souhaitent «privatiser nos libertés» ? Mark Zuckerberg, grand manitou de Facebook, ne se prépare-t-il pas à créer un «camp de travail et de loisirs pour loger ses salariés» ? (4) Le travail rendrait-il libre selon ce Monsieur ?

Cette crise n’est ni financière, ni économique, ni politique : elle est culturelle. Tout perd son sens : qui détient le pouvoir des transnationales ? Où est l’argent ? Dans ces petits bouts de plastique que l’on nomme cartes bleues ? Dans ces chiffres donnés par des agences de notations dont la légitimité a été décidée par on-ne-sait-qui ? Qui tue qui ? Pourquoi d’ailleurs ? Qui croit réellement en Dieu ? Les assassins ? Qui sont les patriotes, les fascistes ? Dans une telle situation il faut comprendre que notre société est en train de se disloquer, par manque de lien, de cohésion sociale. Et qu’est d’autre la Culture que la création et la préservation du lien social ?

Alors il y a ceux qui résistent, les intermittents, les citoyens responsables qui manifestent contre les géants - Monsanto, GAFA, les banques, le TAFTA (5) -, les gens de Culture qui tentent de préserver l’esprit critique, la diversité, et finalement la Liberté. Et puis il y a les acteurs culturels qui ont «compris». Ceux qui «collaborent» à cette grande entreprise d’acculturation, ils en sont même les instruments. Comme on dit à l’école primaire : ils lèchent ! Pour nous, la glace est amère et sent mauvais. C’est une purge, un poison, une infection… Le seul remède est de continuer à penser, à rêver, à créer, ensemble, dans un monde où l’interdépendance est la base, où le respect de l’autre est la seule solution pour que le «vouloir vivre commun» reste la règle qui préserve chacune de nos vies. Sans cela, place à la compétitivité et malheur aux perdants ? Michel Sajn

(1) Vous retrouverez certains des sujets sensibles où le constat d’acculturation, de suppression de liberté démontre bien la chose : www.facebook.com/cultureendanger

(2) www.lexpress.fr/actualite/politique/ moins-on-est-eduque-plus-on-vote-fn_1100733.html — (3) Google, Apple, Facebook, Amazon sont les quatre grandes firmes américaines (nées dans les dernières années du XXe siècle ou au XXIe siècle (sauf Apple créé en 1976) qui dominent le marché du numérique, parfois également nommées les Big Four. Le sigle peut également être GAFAM pour inclure Microsoft.

(4) www.bilan.ch/entreprises/bientot-une-ville-facebook-californie

(5) Manifestation anti-TAFTA à Nice le 18 avril à 15h (www.facebook.com/events/431916760300841)

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