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Billet de blog 15 juin 2022

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Prolongation du certificat Covid européen : la Commission rejette l'avis des citoyens

Les résultats de la consultation citoyenne, très majoritairement défavorables au certificat, ont été rejetés par la Commission au mépris de tout débat démocratique. Cela ne peut plus durer.

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Depuis un an, l’Union européenne a mis en place le certificat Covid numérique en vue de garantir la libre circulation des citoyens européens à travers de l’Union européenne, avec des certificats basés sur le statut vaccinal, sur l'absence d'infection ou sur la preuve du rétablissement. Très vite, dans plusieurs pays membres, le certificat numérique européen a laissé la place à des pass vaccinaux que des gouvernements ont imposés dans la vie quotidienne de leurs citoyens. Le 3 février 2022, la Commission européenne a proposé de prolonger ce certificat européen pour une année supplémentaire jusqu’en juin 2023. Le même jour, une consultation publique a démarré, se terminant le 8 avril dernier. 

La Commission européenne aurait dû attendre les résultats de cette consultation publique et modifier son texte en fonction des résultats. Ici, elle n’a pas attendu le retour des citoyens, et a envoyé sa proposition déjà prête au Parlement et au Conseil européen. Ces deux institutions ont donc travaillé sur le texte initial proposé par la Commission, sans attendre le bilan de la consultation publique clôturée le 8 avril. 

Pire encore, nous avons appris, il y a quelques jours, que la Commission avait balayé d’un revers de main les résultats de cette consultation publique, selon une lettre « confidentielle » adressée le 24 avril dernier à M. López Aguilar, rapporteur du Parlement européen sur ce dossier. Le courrier, en résumant les résultats de la consultation publique, recense près de 400.000 réponses. La quasi-totalité d'entre elles s'oppose au maintien du certificat numérique européen.

La Commission refuse de prendre en compte les conclusions de la consultation publique 

La lettre, méconnue des membres du Parlement européen, détaille les raisons de la Commission de ne pas prendre en compte les arguments des citoyens européens de s’opposer massivement à la prolongation de cet outil : limitation du droit à la libre circulation des citoyens ; obligation dissimulée à se faire vacciner - le règlement proposé par la Commission présente d’ailleurs le certificat comme un outil facilitant « l’accroissement du taux de couverture vaccinale » - ; et enfin, manque de preuves scientifiques justifiant la nécessité ou l'utilité de maintenir de certificat, puisque l'on sait aujourd'hui qu'être vacciné n'exclut pas la transmission du virus. Les justifications de la Commission ne se révèlent ni adéquates ni convaincantes. On peut d'ailleurs être surpris, voir choqué, de lire combien la Commission réfute de manière péremptoire les avis des citoyens européens, tout en restant fidèle à sa version d'origine. Comme s'il ne fallait pas changer de cap et ne rien remettre en cause dans sa politique de certificat numérique. 

Un an après, toujours pas d'étude d'impact

Autre souci de taille : la Commission n’a pas fait d’étude d’impact du certificat numérique européen. Ni avant sa mise en place en juin 2021, ni en début 2022 lorsqu'elle a proposé sa prolongation. Pourquoi ? Si l'on peut admettre l’absence d’étude d’impact lors de sa mise en place, il est en revanche incompréhensible qu'elle n'ait pas été réalisée à ce jour, une année après l’application de cette mesure.

Nous voici contraints, nous, élus européens, à voter sur un dossier primordial tout en étant privés d'informations justes, honnêtes et détaillées de la nécessité et de la proportionnalité de prolonger ce certificat numérique européen.   

Selon le principe de proportionnalité, en effet, toute restriction à la libre circulation des citoyens au sein de l'UE mise en place en réponse à la pandémie, y compris les exigences éventuelles des États membres en matière de présentation de certificats numériques, devraient être levées dès que la situation épidémiologique le permet. La Commission estime que c'est le cas depuis le 15 mars dernier, et remarque que la grande majorité des pays membres ne demandent plus le certificat numérique européen à leurs frontières. 

Illustration 1

Alors pourquoi le prolonger, ce certificat ? 

La justification officielle est que la pandémie n'est pas encore terminée – l'OMS n'a pas annoncé sa fin - et l’Union européenne doit se préparer à des futurs variants dangereux après l'été. Autre raison avancée : garder active l’infrastructure informatique nécessaire pour garantir l’interopérabilité des certificats européens. Le souci avec ces explications officielles, c’est qu’en principe, l’UE n’adopte pas de législation sur la base de pure supposition. Et l’objectif explicite de cet instrument censée "inciter" à la vaccination soulève aussi d'autres questions. 

Nous faisons face à une situation délicate et problématique. Sur un sujet d’une extrême importance pour les citoyens européens, la Commission européenne impose un texte législatif passant outre l’avis des citoyens. Sans compter que la lettre d'information au Parlement européen des résultats de la consultation publique reste largement confidentielle. Enfin, cerise sur le gâteau, nous sommes appelés à voter le jeudi 16 juin 2022 en Commission Libe et la semaine prochaine en plénière sans véritable débat parlementaire à ce sujet.  

De qui se moque-t-on ? Le déni de la démocratie a assez duré.

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