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Billet de blog 11 juin 2022

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Le néo-symbolisme, nouvelle forme de musique ?

Après la musique symbolique, la musique néo-symbolique est-elle possible ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

J’avais appris, au cours de mes années de formation musicale, ce qu’était le mouvement symbolique, en musique. Apparu aux prémices du XXe siècle, avec le compositeur Claude Debussy, c’était, et c’est toujours une musique capable de nous faire représenter mentalement un décor, et de se sentir dans ce décor. En peinture, le grand maître du symbolisme, c’est Claude Monet, connu pour ses nénuphars et ses tableaux de la cathédrale de Rouen à différentes heures de la journée.

Mais si on en revient à la musique, l’écoute de quelques-uns des préludes de Debussy, comme La Cathédrale Engloutie, ou Feux d’Artifice, ou bien encore Voiles, est tout à fait marquante. Mon professeur de musique au lycée m’avait raconté l’histoire de la première de ces trois œuvres. Inspirée d’une légende bretonne, ceux qui la connaissaient et qui avaient eu la chance d’écouter une fois cette œuvre étaient marqués par l’illusion du réel (bien que ce soit une fiction).

Mais Debussy n’est qu’un précurseur du symbolisme : il y a Ravel, mais aussi Stravinsky avec ses ballets dont un est particulièrement célèbre par sa dimension de choc, du moins à l’époque (joué pour la première fois en 1913), Le Sacre du Printemps. La particularité de ces trois compositeurs étaient de bouleverser la manière d’écrire de la musique. Déjà, on était à l’époque d’apparition de la musique contemporaine, dissonante (la deuxième école de Vienne, Schoenberg, Berg, Webern, tous composant au début du XXe siècle) ; mais chez des pianistes comme Ravel et Debussy, il y avait aussi l’usage dominant de la pédale, et de sonorités plutôt exotiques pour l’époque ; Stravinsky faisait lui jouer des instruments dans des registres peu communs, ou peu conventionnels, avec un faible pour des sons brusques et stridents.

Ce qui était fort dans ces œuvres, c’était la théâtralité qu’on pouvait ressentir sans même une mise en scène. C’est, de mon point de vue, encore au-dessus de l’opéra ! Notre esprit fait tout le travail. C’est ainsi une musique qui est favorable au relativisme, à partir du moment où on ne t’impose pas la vision d’un metteur en scène.

C’est ce qui fait pour moi la supériorité « réaliste » de la musique, par sa dimension abstraite. La hiérarchie des arts selon Hegel semble ici fonctionner, ainsi que la théorie des idées de Platon. A un colloque de géographie en hommage au géographe Armand Frémont, un comédien invité à une table ronde remettait en question le propos de M. Frémont, qui disait que Flaubert donnait un portrait plus réaliste de la réalité que le géographe ; ce comédien avait raison de dire que le monde d’Emma Bovary est le monde de Flaubert avant d’être le monde de Bovary, bien qu’il fut contesté par Mme Nicole Mathieu qui disait que celui-ci avait le mérite de prendre la parole, et de mettre des mots sur la réalité qu’il pouvait observer.

Mais a-t-on vraiment besoin de mots pour décrire la réalité ? J’en démens : puisque tout point de vue est subjectif, ou que de toute façon tout je est un nous, ou que comme dirait Stanley Fish nous sommes influencés par les communautés interprétatives auquel on appartient, la musique a le mérite de nous donner beaucoup de liberté de point de vue, tout en nous orientant vers la réalité qu’elle souhaite dépeindre (ou plutôt le compositeur).

Je pense ainsi que les compositeurs du XXe siècle se détachent de leur situation sociale ; peut-être déjà à partir du moment où les compositeurs deviennent indépendants, et cessent de travailler au service de la haute aristocratie : ainsi, à partir du moment ou la musique n’est pas une commande. Les compositeurs sont parfois politique dans leur musique (Wagner, politiquement incorrect selon moi), mais ne le sont parfois pas, ou alors dans le bon sens (Steve Reich, par ses nombreux hommages, et par l’ambient musique qu’il compose, musique éminemment démocratique).

Mais encore n’ai-je pas introduit ce qu’est le néo-symbolisme en musique ; c’est déjà peut-être un barbarisme, puisque c’est un terme qui m’est venu en tête, sans vraiment savoir s’il existait déjà. En fait, si la musique est capable de représenter un décor particulier, une atmosphère particulière, il est très probable que certaines musiques actuelles, parviennent à faire ressentir des états particuliers.

Cette semaine j’écoutais la musique Can’t Sleep d’Adam Swim sur la plateforme Spotify, et en l’écoutant, je me disais bien qu’il me serait impossible de m’endormir si je le souhaitait. Il y a dans certaines productions de musique électronique, une capacité, par la profondeur et par l’association de plusieurs sonorité, à nous faire entrer dans un état particulier, mais il faut auparavant comprendre dans quel sens veut nous faire orienter la dites musique.

Un autre artiste musical actuel, que je qualifierais d’ailleurs de compositeur, est parvenu à cela (et il y en a bien d’autres), C418. Compositeur du célèbre jeu Minecraft, il a su par sa musique, créer des atmosphères dans des environnement particulier, mais aussi influencer le ressenti du joueur au cours de l’expérience de jeu. C’est l’espace vécu, la communion entre un être et l’espace qu’il est amené à fréquenter.

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