Chronique du 26/06/2009
Les élections iraniennes ont démontré d’une manière spectaculaire le potentiel politique des nouvelles technologies. Twitter et YouTube, comme d’autres services, sont devenus des armes pour une contestaion sans pareil: organisation de manifestations, reportages en temps réel, analyse des enjeux locaux et internationaux de la crise, tout semble surgir à travers un journalisme citoyen instantané, grâce au participatif.
Ce succès politique des plateformes du Web 2.0 reflète en premier le lieu une spécificité iranienne, fortement marquée par la densité et la maturité de sa blogosphère. Plus encore, elle confirme un adage bien connu: si les technologies sont neutres, leurs usages sont façonnées par des conditions socio-culturelles. Pour apprécier cette réalité, il suffit de comparer les usages politiques du réseau en Iran, en Chine et au Monde Arabe. Trois régions fortement soumises à la censure par des autorités souvent oppressives et soucieuses de contrôler la libre circulation de l’information en ligne.
Dans le cas Chinois, la surveillance et le filtrage s’associent souvent à la création de faux substituts des grands sites occidentaux (Google par exemple), présentant des informations partielles et épurées. Dans ce cas, la contestation passe par l’usage d’un langage codé et des technologies qui permettent de détourner les filtrages d’accès.
Dans le Monde Arabe, on est devant ou bien l’emprisonnement et parfois la torture d’internautes actifs et connus, comme en Égypte u en Tunisie, ou bien devant un filtrage excessif et généralisé comme en Arabie Saoudite 9l’Iran pratique toutes les formes de la censure du net …) .
La contestation iranienne, par contre, met en évidence surtout la primauté de l’accès comme droit fondamental. Mieux encore, elle démontre la puissance transformative d’un conflit de compétence numérique exploitée à la fois par les manifestatnts et le régime.. Ainsi, l’usage intelligent et astucieux du mobile et de la géolocalisation, l’exploitation des aggrégateurs pour gérer la fiabilité de l’information, la mise en service du web social au profit de l’activisme politique.
Ce succès politique du réseau nous invite aussi à adapter un réalisme pragmatiste vis-à-vis la dimension politique du net: nos outils n’ont point un pouvoir nécessairement salvateur et utopiste. Ils sont façonnés par la compétence et les usages. Plus encore, ces outils sont aussi souvent et encore fragiles.
Twitter, par exemple, est une plateforme incontournable mais malheureusement toujours en quête de stabilité. Hier encore, les fonctions Recherche et Trends ( qui ont joué et continuent à jouer un rôle essentiel dan le cas iranien) ont été temporairement retirées à la suite de l’annonce du décès de Michael Jackson. Cette fragilité nous rappelle à la fois les contraintes imposées par l’infrastruture technologique mais aussi les vulnérabilités des politiques du réseau.
Néanmoins, il reste vrai que la contestation iranienne inaugure, au moins au Proche-Orient, un activisme politique ancré dans la culture numérique.