Annabel B

Ergonome

Abonné·e de Mediapart

14 Billets

0 Édition

Billet de blog 20 avril 2023

Annabel B

Ergonome

Abonné·e de Mediapart

Carrefour : l'arrêt maladie des femmes, une avancée sociale ? Ça me laisse sang voix

Carrefour présente comme une avancée sociale le congé pour endométriose. Qu'une entreprise puisse présenter comme une avancée sociale le fait de proposer un congé à des femmes malades me désole profondément. Et de voir autant de voix s'en réjouir ne fait que m'affliger d'avantage.

Annabel B

Ergonome

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Carrefour, dans sa grande mansuétude envers ses salariées et autres caissières à temps partiel sous-payé, ose nous présenter comme une avancée sociale le congé pour endométriose. Qu'une entreprise puisse présenter comme une avancée sociale le fait de proposer un congé à des femmes malades me désole profondément. Et qu'en prime on doive s'en réjouir et ne voir que la coupe menstruelle à moitié pleine plutôt que celle à moitié vide, ne fait que m'affliger d'avantage.

1 - Accorder un congé, sans pénalité financière, à des femmes qui ne peuvent pas aller travailler, depuis longtemps pour certaines, c'est juste symptomatique de la déplorable considération de la santé des femmes en général et au travail en particulier.
On ne peut décemment pas dire que c'est une avancée sociale que d'autoriser des femmes à s'arrêter quand elles sont malades ! Quand on sait combien de femmes vont au travail dans des conditions de santé féminine qui devraient donner lieu à arrêt de travail, indépendamment de endométriose ou pas. Je l'ai écrit dans l'article précédent : si on ne prend que les règles comme période problématique (et on est alors loin du compte des difficultés liées à la vie hormonale et procréative), c'est 11 % des femmes actives qui n'ont pas mal pendant les règles (enquête IFOP).

2 - Quel message envoyé aux femmes qui ont d'autres pathologies, aux femmes qui ont d'autres problèmes avec leur vie hormonale que des douleurs (et il y en a de nombreux autres problèmes), aux femmes qui n'ont pas été diagnostiquées mais qui n'en souffrent pas moins.

Le message c'est : votre douleur, vos difficultés autres, ne sont pas légitimes à donner lieu à un répit.

Et tout le monde de me répondre : c'est super quand même, c'est un  petit pas ! Déjà nous sommes d'accord, c'est un petit pas, et donc on est d'accord qu'il doit être annonciateur d'autres pas. Donc cela veut bien dire qu'il en faut un grand au final. Et pourquoi pas tout de suite ?

Mais non, malheureusement, nous ne pouvons pas présumer que ce "petit pas" deviendra une avancée. On voit où nous mènent les "petits pas" en écologie. Dans le mur. C'est pareil ici.

Et en attendant d'hypothétiques futurs autres petits pas, on oppose les pathologies légitimes et celles qui ne le sont pas, les douleurs légitimées par un diagnostic et celles inexpliquées (mais néanmoins réelles).

L'emballement médiatique à restreindre aux règles et aux douleurs "incapacitantes" les problèmes de conciliation entre vie pro et vie hormonale, et ce en prenant systématiquement l'endométriose comme référence d'une pénibilité qui seule mériterait un congé est un facteur de risque pour toutes les autres femmes qui n'ont ni endométriose, ni règles totalement incapacitantes (ou que les femmes ne jugent pas comme telles), ni règles du tout mais qui n'en ont pas moins des difficultés de conciliation entre vie pro et vie hormonale.

Carrefour essaie de nous faire croire qu'il est en avance, mais le congé menstruel est déjà dans les tuyaux de nos parlementaires et Carrefour le sait parfaitement. L'accélération actuelle des entreprises pour restreindre ce congé menstruel à une pathologie particulière ou à des conditions particulières, qu'elles essaient maintenant de définir elles-mêmes à la hâte pour infléchir la tendance, me parait fort suspecte ;-). C'est mon côté complotiste, puisque voix discordante est maintenant du complotisme :-)

Certaines entreprises vont même jusqu'à étendre ce congé menstruel à tous les hommes par souci d'égalité, ou "de ne pas pénétrer l'intimité des femmes" (je cite, il ne faudrait pas trop me pousser pour publier le post Linkedin qui le dit :-).

Vous souhaitez participer à la réflexion et à l'évaluation des besoins des femmes en matière de congé de vie hormonale et procréative : voici un questionnaire auquel vous pouvez répondre anonymement ou pas selon votre préférence. 8 minutes.

Merci. Lien de contact dans le questionnaire pour toute question avant ou après le questionnaire.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.