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Billet de blog 4 décembre 2014

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SORTIR DE L’AUSTÉRITÉ ET DE LA RIGUEUR : UN DEVOIR DE VIE ET DE SURVIE

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

J’ai entendu ce matin sur France Inter (émission de Bernard Guetta) une très intéressante émission qui portait sur l’économie. Y était invité Gaël Giraud, professeur et chercheur en économie (1) et traducteur du livre de Steve Keen, L’imposture économique (2). G. Giraud a énoncé, de façon claire et sans aucune langue de bois, tout ce que nous lisons depuis plusieurs années, sous la plume notamment des Économistes atterrés.

Les théories économiques orthodoxes, sur lesquelles se fondent les politiques de rigueur et d’austérité, sont  erronées, nous conduisant à une probable prochaine crise financière grave, et plus généralement dans le mur.

Les États européens, sous l’influence de la BCE,  ont adopté l’idée que la déflation était une bonne chose, que la réduction des dépenses publiques était hautement nécessaire pour abolir « la dette », occultant totalement le fait que les institutions les plus endettées sont les établissements bancaires, suivis par les entreprises privées, suivies par l’État. En réduisant les dépenses publiques, l’État pénalise gravement l’économie (augmentation du nombre de chômeurs, réduction de la consommation, stagnation économique globale) et la vie quotidienne des citoyens (école, justice, environnement, système de santé …) sans toucher (en protégeant) les établissements financiers. Ajoutons que les effets  sociétaux  de cette politique sont terribles (augmentation de la pauvreté, des injustices, avec leur cortège de  violences, d’intolérances qui font le lit des politiques d’extrême-droite).

Selon Gaël Giraud (qui dit rencontrer régulièrement Hollande), cette politique de rigueur et d’austérité peut et doit être infléchie.

Dans quel sens?

 1) Il faudrait d’abord cesser de réduire les dépenses publiques mais au contraire les relancer, en privilégiant toutes les activités qui permettront de réduire la consommation  des énergies fossiles (par exemple, travaux sur tous les habitats) et d’augmenter la qualité de vie des citoyens (investir dans l’école, l’université, la recherche, la justice, l'environnement, le système de protection sociale et de santé …).

Pour conduire une telle politique, il faut évidemment que chaque pays se rende plus indépendant de l’UE et de la BCE qui exercent actuellement une influence délétère en imposant une théorie économique erronée et tendancieuse. Cette indépendance est possible si chaque gouvernement sort de la doxa économique actuelle et reprend en main les rênes du pouvoir, ce qui est une décision politique.

 2) Comment financer ces investissements publics? Actuellement, les établissements financiers prêtent de l’argent aux États à des taux très bas ou négatifs. Si avait lieu un changement de politique en faveur de l'investissement public, les établissements financiers pourraient se formaliser des "risques d’inflation" et des hausses des dépenses, et pour exercer une pression sur les décisions politiques, ils pourraient augmenter leurs taux d’intérêt. Pour contourner cet obstacle, les gouvernements pourraient procéder à un emprunt public, permettant de financer les dépenses publiques qui profiteront aux citoyens et à leurs descendants en préservant l’environnement et en augmentant la qualité de vie de tous et toutes.

3) L’euro ne fonctionne pas bien, car il se fonde sur une totale dissymétrie entre pays du nord et pays du sud, entrainant des privilèges pour les premiers au détriment des seconds. Il faudrait donc garder l’euro comme monnaie commune pour les échanges extérieurs, et créer des euros nationaux ayant leurs capacités propres de dévaluation si nécessaire. L’Allemagne, qui bénéficie le plus du système actuel, sera en désaccord. Mais ce n’est pas à elle seule de décider de l’avenir de tous les pays européens.

4) Il faudrait contrôler les établissements financiers et les marchés financiers au lieu de les laisser non seulement sans régulation mais devenant instances  de jugement de l’économie des pays (les agences de notation !). Car, laissés à eux-mêmes, les marchés financiers se  lancent dans une spirale de profits sans fond et de bulles financières qui, en éclatant, provoquent de graves crises économiques et sociales.

Tous ces changements de politique requièrent à la fois l’implication des partis politiques intéressés par une réforme économique et sociale contre les politiques de rigueur et d’austérité  et celle des mouvements citoyens (3), seuls aptes à faire pression sur les politiques gouvernementales et à sortir les partis politiques de leurs habitus, de leurs ornières et de leur sclérose.

 __________

(1)  20 propositions pour réformer le capitalisme, Gaël Giraud et Cécile Renouard (dir.) Ed. Flammarion, 2009. Et: Illusion financière,  Gaël Giraud. Les Editions de l’Atelier, 2012.

(2)  L’imposture économique, Steve Keen. Les Editions de l’Atelier, 2014 (paru il y a dix ans en anglais sous le titre  Debunking Economics)

(3) Voir par exemple: http://blogs.mediapart.fr/blog/walentin-perez/031214/gentils-virus-une-democratie-partisane-pour-la-victoire-des-99

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