Le peuple grec a dit massivement NON à l'austérité, en dépit des sondages bidonnés, de l'information truquée, des pressions exercées de tous les côtés contre le référendum du dimanche 5 juillet 2015.
Pendant que Tsipras s'apprête à faire une énième fois devant l'Eurogroupe ses propositions, en posant sur la table la restructuration de la dette odieuse et illégitime, cinq économistes écrivent une lettre ouverte à Merkel. Cette initiative, mise en Une du Parisien, montre qu'il se passe quelque chose d'important, contre l'économisme délirant et antidémocratique qui est devenu le fond de commerce de l'eurozone.
Mais la mobilisation internationale autour de la Grèce est aussi liée au fait que le Greexit, outre qu'il bouleverserait l'euro zone, pousserait la Grèce à des alliances (Kremlin compatibles) qui déplaisent fortement aux USA. Ce n'est pas pour rien que le FMI a laissé sortir juste avant le référendum des informations sur les dangers de la politique d'austérité en Grèce, et que Obama s'est entretenu hier avec la chef de l'Europe, Merkel. C'est donc naturellement à Merkel que la lettre des cinq économistes, publiée sur un support américain, est adressée (bravo à Hollande d'avoir joué un rôle moteur en Europe!).
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Les politiques d'austérité ont échoué. Tel est le titre de la letrre ouverte écrite par cinq économistes et adressée hier soir à Merkel sur le site du magazine américain The Nation.
Dans cette lettre, cinq économistes allemand, français, américain, turc et britannique (Heiner Flassbeck, Thomas Piketty, Jeffrey D. Sachs, Dani Rodrik, Simon Wren-Lewis) demandent à la chancelière allemande de «rectifier le tir» en renonçant aux politiques d'austérité et en consentant un «important» effacement de la dette grecque.
"Nous exhortons la chancelière (Angela) Merkel et la troïka (des créanciers du pays) à penser à rectifier le tir, afin d'éviter un nouveau désastre et de permettre à la Grèce de rester dans la zone euro" continue le texte.
Et l'image utilisée par le collectif d'économistes est percutante : «A l'heure actuelle, le gouvernement grec est sommé de mettre un pistolet sur sa tempe et d'appuyer sur la gâchette. Malheureusement, la balle ne tuera pas simplement le futur de la Grèce en Europe. La victime collatérale sera la zone euro en tant que havre d'espoir, de démocratie et de prospérité ».
Selon les cinq économistes, l'Europe a été fondée après-guerre sur l'idée du «pardon» dont l'Allemagne a elle-même profité, en bénéficiant en 1953 d'un effacement massif de la dette, qu'elle doit perpétuer aujourd'hui.
«Nous devons restructurer et réduire la dette grecque, donner à l'économie un peu d'air pour qu'elle se rétablisse, et permettre à la Grèce de rembourser une dette moins lourde sur une plus longue période de temps», assurent les signataires.
Athènes, soutenu indirectement par le FMI, réclame un allègement de sa dette dont les Européens, Allemagne en tête, ne veulent pour l'instant pas entendre parler. Deux jours après le rejet par référendum des propositions des créanciers (FMI, UE, BCE), la Grèce n'avait mardi toujours pas présenté de plan de réformes pour éviter une sortie de la zone euro, que la Commission européenne admet ne plus exclure.
«Il est aujourd'hui temps de repenser, de façon humaine, le programme d'austérité punitif et infructueux des récentes années et accepter une réduction importante de la dette de la Grèce en relation avec des réformes tant attendues » dans le pays, assure le collectif qui conclut sa lettre ouverte à Angela Merkel en jouant sur la fibre historique. «L'Histoire se souviendra de vous pour ce que vous aurez fait cette semaine.»
Les signataires de la lettre ouverte à Angela Merkel sont:
- Heiner Flassbeck : ancien secrétaire d'Etat allemand aux finances (1998-1999).
- Thomas Piketty : économiste, directeur d'études à l'EHESS et professeur à l'Ecole d'économie de Paris.
- Jeffrey D. Sachs : professeur d'économie américain, directeur de l'Institut de la Terre de l'Université Columbia (New York).
- Dani Rodrik : professeur d'économie turc à l'Université de Harvard.
- Simon Wren-Lewis : économiste britannique, professeur à l'Université d'Oxford.