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Billet de blog 16 janvier 2018

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LA FRANCE EST LE PAYS DU BONHEUR

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Existe-t-il un pays aussi accueillant humainement et géographiquement - sa performance touristique n'est plus à démontrer-, plus passionné intellectuellement et émotionnellement, et porteur d'autant de valeurs qui ont infusé à l'humanité nombre de ses causes en faveur de la Dignité de la Personne ?  

" Heureux comme Dieu en France " : cette phrase qui relève de la tradition des juifs ashkénazes ayant choisi d'émigrer en France à partir de la Russie, de la Pologne et des Pays baltes pour fuir l'antisémitisme et ses pogroms a largement rayonné, depuis le début du siècle précédent, dans toute la Mittle Europa et, au-delà, sur l'ensemble de notre planète. 

Voici pour la manière dont nous sommes perçus, et cela représente un bienfait considérable. Mais on tait trop souvent notre propre relation, intime et chaleureuse, à notre pays ; notre amour profond et si souvent exclusif qui transforme chaque expatrié en un amoureux soupirant entre deux engagements, deux réussites, deux investissements, deux innovations qui lui font très temporairement oublier sa belle France ; notre rapport fasciné et heureux à notre propre complexité : fleuves, montagnes, fromages, musiques, patois...  

Existe-t-il un autre pays-écrin dont la traversée en Train à Grande Vitesse s'accompagne d'autant d'émerveillement devant la variété des paysages, la beauté des champs cultivés, la profondeur des couleurs, les saveurs promises liées à chacune des gastronomies différentes ? La France est un opéra d'Hector Berlioz : du début à la fin tout y est majestueux et lumineux. Comment reprocher à Louis XVI sa fuite à Varennes ? Il n'y a pas que Paris qui soit Lumière au sein de ce " vieux pays " ! Il est désormais temps de déclarer collectivement notre flamme à la France. Pourquoi pas une journée nationale dédiée à l'Amour de notre Pays ? 

" Liberté, liberté chérie/Combats avec tes défenseurs !/Combats avec tes défenseurs ! " Ecoutez la répétition au sein de ce quatrième couplet, trop méconnu, de La Marseillaise : notre hymne national est une allégorie de l'amour et celui-ci est tourné vers la Liberté, les Libertés. La France est ainsi : une nation de principes dont elle comprend et diffuse la vocation universelle. Et puisqu'il convient de parler par figures (ce qui est le sens même de l'étymologie d'allégorie), nous proposons que cette parole différente qui est la nôtre aujourd'hui permette de mesurer ce bonheur : la France est libre et doit le rester. 

Dans un monde et un univers où tout est interactions, dépendre de soi dans la prise de décisions représente le privilège de la Liberté. Nous avons ce bonheur. Mais nous traversons des crises, c'est-à-dire qu'interviennent des changements dont nous devons comprendre les ressorts non apparents : ce sont eux qui entraînent les mécanismes produisant des accès de nervosité parfois incontrôlés. Ils sont toujours le symptôme d'une pathologie dont nous pouvons guérir et qui fut diagnostiquée par Charles Péguy, dans Notre patrie, voici à peine plus d'un siècle : " On ne saura jamais assez tout ce que la peur de ne pas paraître assez avancé aura fait commettre de lâcheté à nos Français. " 

Malgré ce qui fait sa spécificité, et qui est aussi ce qu'elle a de meilleur économiquement - citons ici les grandes industries structurantes du pays ainsi que celles, dématérialisées, qui ne cessent de croître, tout autant que l'incomparable réseau de PME/PMI qui constitue également une des forces de la France -, notre cœur faiblit injustement dans l'appréciation de notre manière de vivre et d'appréhender le réel : incertitudes, attentes insatisfaites, doutes, peuplent nos conversations. Raymond Aron ne partageait ni le pessimisme d'Alexis de Tocqueville ni celui de Max Weber à l'égard, respectivement, de l'Etat-Providence et de la société moderne. Cet esprit français, qu'il faut revisiter sans cesse, privilégiait " la vocation universelle de la Raison "[1]. 

La Raison nous incite à affirmer que la France n'est plus en crise ; qu'il est temps pour elle de redécouvrir ses propres beautés, ses atouts, ses élans. Comprendre ce que veut dire sortir d'une période difficile - et notre nation a su le faire, en particulier après les drames de l'occupation et de la collaboration - nécessite à la fois de revenir à l'étymologie du verbe car le latin sortiri signifie notamment " échoir en héritage "[2], et à son évolution sémantique : " qui échappe à "[3]. Sortir reprend donc, fort logiquement, le sens du latin décider. Dès le onzième siècle, la Chanson de Roland, ce poème épique qui constitue l'un des fondements de notre âme collective, affirme la conviction d'avoir " échappé à la mort ", d'être " épargné ", précisément par cette idée de " mouvement. "[4] 

Si la France est là, et bien là, pour elle-même et pour le monde, c'est parce que sa langue - en constante progression car le nombre de ses locuteurs ne cesse et ne cessera d'augmenter fortement - permet de dire à la fois " les libertés de l'esprit et les libertés civiques. "[5] Nos débats, parfois âpres, sont l'expression de nos réussites : s'il est né une forme de " nouvel égoïsme territorial "[6], c'est parce que, depuis trente-cinq ans, nous ne sommes plus un Etat hypercentralisé, ce qui, souvenons-en, provoquait notre suffocation. Notre métropolisation s'accompagne de la valorisation de nos terroirs. Il n'y a pas une France contre l'autre, celle des métropoles et celle des périphéries ou ruralités, mais une France dont l'ADN est une mosaïque : chaque élément est décisif, indispensable, sous peine de voir interrompue la trame de notre identité. 

Et si nous placions le bonheur, non plus seulement dans sa recherche, mais dans sa conscience active comme paradigme ? Sur un splendide territoire, des citoyens animés d'un génie individuel et collectif agissent au mieux, avec la conscience d'appartenir à une nation : lorsque plus de quatre électeurs sur cinq se déplacent pour élire notre Président de la République, nous dépassons de beaucoup la situation qui prévaut aux Etats-Unis (54,2% le 8 novembre 2016, dans un contexte politique pourtant passionné.) Nous avons appris de notre histoire que seules les perspectives ouvertes par " le champ des opportunités "[7] permet de nous penser comme nation dans l'intégration de toutes nos exceptions, comme pays-réussite dans la pleine conscience de nos atouts complémentaires.  

Notre bonheur reposera sur notre cohésion, sur cette attitude des gens qui s'aiment non pas parce qu'ils se regardent l'un l'autre, mais parce que leurs espérances convergent dans la même direction.  

M. Morad EL HATTAB 

Lauréat du Prix littéraire pour la Paix et la Tolérance 

Diplômé Médaille d'Argent de l'Académie des Arts, des Sciences et des Lettres

& M. Philippe GLOAGUEN 

Penseur et voyageur 

[1] Aron, Raymond, Mémoires, Editions Julliard, Paris, 1983, page 729 

[2] Rey, Alain (sous la direction de), Dictionnaire historique de la langue française, tome III, Editions Le Robert, Paris, 1998, page 3570 

[3] Ibid. 

[4] Ibid., page 3571 

[5] Borne, Etienne, Contredire la dérive, Revue Commentaire, Xème anniversaire, Editions Julliard, Paris, 1988, page 15 

[6] Davezies, Laurent, Le nouvel égoïsme territorial, Editions du Seuil, La République des idées, Paris, Paris, 2015 

[7] Ibid., page 103 

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