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Billet de blog 22 juin 2025

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Lettre ouverte à propos de la tauromachie

Je fais suite à une publication qui célébrait l'exploit d’un torero. Ce que j’ai ressenti à sa lecture: un profond malaise, une tristesse mêlée d’indignation. Pas par goût de la controverse, mais parce que je pense qu’on ne peut pas rester silencieux face à une pratique aussi violemment ancrée dans l’histoire que dans le présent.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Je ne comprends pas la tauromachie, non parce qu’elle serait trop complexe, mais parce qu’elle repose sur un postulat que je refuse : celui qu’il serait acceptable de faire spectacle d’une souffrance infligée. Que cette violence soit ritualisée, codifiée, qu’elle soit portée par une culture, ne la rend pas plus acceptable. L’histoire est remplie de traditions que nous avons, fort heureusement, su interroger, remettre en cause et parfois abolir. Cela n’efface pas leur portée culturelle ; cela marque seulement une volonté de progrès éthique.

Ce qui me heurte dans la tauromachie, ce n’est pas seulement la mort du taureau. C’est ce qu’elle révèle d’un système de pensée qui continue d’organiser une hiérarchie entre les vies. On parle souvent du taureau comme d’un être privilégié parce qu’il vit quelques années en liberté avant d’être sacrifié. Cela me semble un raisonnement cynique. Faire naître un être pour en faire un instrument de spectacle et de mort n’a rien d’une préservation. Cela a tout d’un marché bien huilé, qui s'autorise la souffrance comme effet de mise en scène.

Je n’ai pas à tolérer ce que je considère comme indigne, sous prétexte que cela appartient à une tradition. Et je n’accepte pas que l’on réduise cette indignation à de l’intolérance. Je respecte la parole de chacun, mais je crois que certaines paroles méritent d’être fermement contestées, surtout lorsqu’elles défendent des pratiques de domination, qu’elles concernent les humains ou les autres vivants.

Je crois que l’humanisme, le vrai, ne consiste pas à revendiquer ses préférences esthétiques ou culturelles comme intouchables. Il consiste à interroger sans relâche ce que nos plaisirs impliquent. À quel prix ? Pour qui ? Et pourquoi continuer ?

Je n’ai pas de vérité absolue à imposer. Mais j’ai une éthique à défendre. Et je continuerai à me dresser, avec mes mots, contre toute forme de violence travestie en tradition.

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