En France, depuis la loi du 11 février 2005 pour "l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées", les entreprises ont l’obligation de favoriser l’emploi des personnes en situation de handicap. Pourtant, sur le terrain, une réalité inquiétante persiste : la RQTH (Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé) reste largement méconnue des salariés, et trop souvent ignorée par les employeurs. C’est encore plus criant lorsqu’il s’agit du handicap psychique.
Qu’est-ce que la RQTH ?
La RQTH est un dispositif officiel, accordé par la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées), qui permet de reconnaître qu’un salarié ou un demandeur d’emploi rencontre des difficultés durables dans le cadre professionnel en raison d’un handicap. Elle ouvre des droits : accès à un emploi aménagé, accompagnement spécialisé, aides financières, protection contre le licenciement abusif, aménagement d’horaires, etc.
Contrairement aux idées reçues, la RQTH ne concerne pas uniquement les handicaps visibles ou physiques. Elle inclut également les handicaps psychiques : dépression chronique, bipolarité, troubles anxieux sévères, schizophrénie stabilisée, burnout récurrent, etc.
La loi de 2005 : un engagement fort... sur le papier
La loi du 11 février 2005 impose aux entreprises de plus de 20 salariés d’employer au moins 6 % de travailleurs handicapés. Pour celles qui ne respectent pas cette obligation, une contribution financière est versée à l’AGEFIPH.
Mais dans les faits, nombre d’entreprises préfèrent payer plutôt que d’embaucher ou d’accommoder. Pire : certaines ignorent tout simplement la loi. Le sujet reste tabou. Le handicap psychique, lui, est encore plus stigmatisé, souvent assimilé à une fragilité incompatible avec le monde du travail. Pourtant, ces troubles sont fréquents et parfois invisibles.
Le handicap psychique : la double peine
Les personnes concernées par un handicap psychique subissent une double invisibilité : d’abord parce que leur handicap ne se voit pas, ensuite parce qu’il est souvent incompris, voire nié. Beaucoup n’osent pas faire la demande de RQTH par peur d’être stigmatisés, mis à l’écart, ou freinés dans leur carrière.
Paradoxalement, la RQTH pourrait les protéger. Elle permet des adaptations, elle engage un dialogue avec l’employeur, elle peut être un tremplin vers le maintien dans l’emploi ou une reconversion.
Mais encore faut-il que les salariés soient informés. Or, dans de nombreuses entreprises, personne ne leur parle de la RQTH : ni RH, ni médecin du travail, ni représentants syndicaux. C’est une responsabilité manquée.
Il est temps d’ouvrir les yeux
Aujourd’hui, le taux de chômage des personnes handicapées est deux fois plus élevé que la moyenne nationale, et beaucoup abandonnent le monde du travail faute d’accommodements adaptés. Ce n’est pas seulement un échec humain, c’est aussi un non-sens économique.
Faire connaître la RQTH, former les managers, lever les tabous sur le handicap psychique, sanctionner les entreprises défaillantes : ce sont des mesures urgentes et nécessaires.
Et maintenant ?
La reconnaissance du handicap psychique est un enjeu de dignité et de justice sociale. Elle commence par l'information, la bienveillance et le respect du droit. Que chaque salarié sache qu’il peut faire une demande de RQTH. Que chaque entreprise comprenne qu’elle a une obligation légale — et morale — de construire un environnement inclusif.
Parce qu’un monde du travail plus juste est possible. À condition de le vouloir.