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Mustapha Ait larbi

Intellectuel dubitatif. Guitariste a l'occasion. Né Algérien par hasard ce, comme les Français. Par hasard !

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Billet de blog 1 décembre 2025

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Moi c'est Karim, né de parents Algériens en France.

On lit rarement des trajectoires racontées de l’intérieur, avec les mots de ceux qui les vivent. Karim, 32 ans, partage ici son histoire : enfance en banlieue, galères d’intérim, petits boulots, débrouille, et une rencontre avec un vieux de 72 ans qui change la donne. Un récit brut, sans filtre, sans fioritures.

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Illustration 1

Mustapha, que j’appelle "le vieux" parce qu’il va bientôt tomber du côté où ça penche, m’a demandé de raconter ma trajectoire. Je vous préviens tout de suite : il a vraiment des mots à la con, le vieux. Comme j’aime pas écrire, c’est lui qui va le faire pour moi.J’ai 32 ans, je suis né à Montereau, dans le 77, et c’est là que j’ai connu le vieux, qui faisait une enquête pour la revue d’une fac. On vivait dans un pavillon pas mal avec mes parents. Mon père était chauffeur de bus scolaire, et un jour ils ont supprimé le bus : il est devenu chômeur. Mais il était trop vieux pour retrouver du travail et trop jeune pour partir à la retraite. Le vieux appelle ça "la double aliénation". Moi, j’appelle ça "être dans la merde".

À l’époque, je passais mon permis gratuitement avec un club de prévention, mais ça aussi ils l’ont supprimé. Il paraît que ça servait à rien et que ça coûtait trop cher de payer des éducs de prévention.J’ai bossé comme chauffeur-livreur pendant un an. Comme je me suis fait choper par des radars (fallait toujours aller plus vite), je me suis ramassé une suspension de permis de six mois. Ensuite, pendant des années, avec mon père, on a fait toutes sortes de missions d’intérim, surtout des boulots durs dans le bâtiment. De toute façon, pour nous, il n’y a plus que l’intérim : les patrons ne veulent plus de mecs à l’année.

Entre-temps, comme tout le monde, je vendais du kif. Pas à la tonne : cinq grammes, dix grammes maximum. Ici, c’est une culture, comme dit encore le vieux. Lui, il a toujours besoin d’avoir des mots à la con. Nous, on appelle ça "la démerde ».Et puis, il y a cinq ans, un gars vendait une remorque à churros, des beignets mexicains cuits dans l’huile. J’avais un peu de fric, alors après avoir tourné deux mois avec le vendeur, j’ai acheté la remorque pour pratiquement rien. Le type partait à la retraite, c’était comme un cadeau.

Sinon, avec mes parents, tous les ans, on allait au bled un mois en Algérie. C’est ma grand-mère qui logeait tout le monde.Un jour, j’ai retrouvé Mouss (le vieux qui marche lentement ) sur un marché. Belle surprise. On a échangé nos téléphones et voilà l’histoire. Et maintenant, je me promène avec un vieux de 72 ans au Maroc, qui veut quitter son pays, et pourtant plus français que lui, c’est pas possible. Enfin, comme il sait faire plein de trucs, surtout les demandes de papiers au bled, il est capable de monter une boutique en cinq minutes

J’ai rien de plus à dire.

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