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Intellectuel dubitatif. Guitariste a l'occasion. Né Algérien par hasard ce, comme les Français. Par hasard !

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Billet de blog 5 septembre 2025

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Les mots à la con

Depuis que les médias Bolloré ont pris le pouvoir, le vocabulaire s’est enrichi à une vitesse folle de mots à la con

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Depuis que les médias Bolloré ont pris le pouvoir, le vocabulaire s’est enrichi à une vitesse folle de mots à la con. Une nouvelle famille de mots est apparue, des mots à con. Woke, bobo, gérer, incontournable, j'ai pas les codes,  islamo-gauchiste, intello-pathos, pieuvre islamique, intello-suffisant. Et il y a même, parfois, trois tirets – un clignotant, une signalétique du délire : Islamo-gauchiste-hamaniste. C’est plus fort que ce que faisait le nazi de Heidegger, ce rapprochement grotesque mais calculé.

Bien entendu, tout cela émane des " laquais intellos-abrutis " de l’extrême droite, ceux qui investissent le champ lexical comme on occupe un territoire vierge, pour y déposer leurs ordures et y implanter leurs idées venimeuses. Ces mots sont des pièges, des étiquettes qui viennent marquer l’esprit, non pour informer, mais pour inverser les valeurs. Dans le paysage médiatique où la vérité se déforme comme du chewing-gum sous la chaleur, ces mots sont des armes qui ne laissent aucune place à la réflexion, au doute, à la nuance.

Il suffit de caser un woke dans une phrase, et toute une pensée, une culture, un mouvement deviennent des ennemis. Il suffit de traiter un intellectuel de bobo ou de gauchiste pour réduire son argumentation à une caricature, l’isolant de tout débat rationnel. On pourrait croire que ce sont juste des buzzwords, des mots vides, mais ce n'est pas le cas. Ce sont des machines de guerre, des outils de déshumanisation. Ils ne servent qu'à diviser, à stigmatiser, à exclure ceux qui ne se soumettent pas à l'ordre établi, à l'ordre médiatique Bolloré qui dicte ce qu'on doit penser.

Et ces mots ? Ils arrivent toujours par la même porte : une porte qui grince, celle d’un discours qui prétend être à la pointe de la liberté, mais qui est en réalité une fausse liberté. La liberté de se faire plier l’esprit sous le poids d'une idéologie imposée, une liberté de se couper de tout ce qui dépasse le cadre étroit des dictats de la pensée unique. L'aliénation en guise d'information...

Les intellos-suffisants, les pièces rapportées des plateaux télé, qui ne connaissent de la pensée que le vernis du préjugé, ils sont là pour faire de la langue un champ de bataille où seule leur version de l’histoire a droit de cité. Ces mots à con, ils les utilisent pour vider de leur sens des concepts entiers : la justice, l’égalité, la liberté. Chaque terme est noyé dans un océan de simplifications, chaque nuance est avalée par la superficialité.

L’objectif est clair : transformer la langue en un terrain de guerre, où les mots ne sont plus des instruments d’échange, mais des armes de guerre. Un champ lexical qui ne laisse plus place à la diversité des pensées, une guerre du langage qui devient une guerre des cerveaux.

Et c’est là que nous en sommes. Un monde où l’on n’a plus le droit de parler, de penser, sans risquer d’être réduit à un terme dévalorisant, un label déshumanisant. Où l’on ne s’engage plus dans un débat, mais dans un combat. Un combat pour détruire ceux qui osent encore défendre un autre monde que celui qui se bâtit, silencieux mais solide, sous le poids de ces mots à con.

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