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Mustapha Ait larbi

Intellectuel dubitatif. Guitariste a l'occasion. Né Algérien par hasard ce, comme les Français. Par hasard !

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Billet de blog 12 décembre 2025

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Pauvreté au Maroc: billet sympa.

À environ 150 kilomètres de Rabat, nous nous sommes arrêtés dans une petite ville où la pauvreté s’impose au regard avec une brutalité désarmante. Les maisons délabrées côtoient des abris de fortune faits de bâches et de tentes, au milieu de terrains vagues et caillouteux.

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Illustration 1

Un enfant, Hocine, accompagné de son âne, fouillait les poubelles. Il récupérait les bouteilles et bidons en plastique pour les revendre. Il est jeune, mais tout autour de lui semble marqué par l’usure : l’âne fatigué, la charrette branlante, les harnais élimés, ses vêtements trop vieux. Timide au premier abord, il s’est vite détendu. Nous lui avons offert une lampe électrique à manivelle, et son émerveillement devant ce petit objet nous a bouleversés.

Karim s’étonne toujours de mon besoin de dialoguer avec les plus démunis, de comprendre leur quotidien. Les riches, eux, ne m’intéressent guère. Hocine nous a expliqué son travail : chaque jour, il collecte les plastiques et les revend à une fabrique. Une bonne journée lui rapporte entre 1,5 et 3 euros.

Son père est contrôleur à l’entrée d’un port, sa sœur vit avec eux dans une unique pièce sans confort, nichée dans la Casbah. Le contraste est saisissant : le Maroc est un pays riche en ressources, mais le taux de pauvreté reste alarmant, malgré des statistiques officielles qui tentent de minimiser la réalité. Le salaire minimum, entre 280 et 320 euros, ne suffit pas à offrir une vie digne. Ici, on travaille aujourd’hui et on verra demain.

Hocine complète ses revenus en vendant quelques centimes des escargots cuits qu’il ramasse sur des cactus. Les habitants les consomment comme des friandises. En septembre, il récolte les fruits des cactus, prisés par les plus aisés qui les achètent et les dégustent sur place.Nous avons invité ce garçon, déjà adulte malgré son âge, à partager une tajine avec nous. Ce fut un instant de bonheur simple, le plaisir de donner, de partager, et de voir un sourire illuminer un visage marqué trop tôt par les épreuves de la vie.

Le lendemain à la Casbah

Le lendemain, nous avons décidé de retrouver Hocine chez lui. Des ruelles étroites, les murs décrépis, les odeurs de cuisine et de poussière composaient un décor à la fois vivant et oppressant. Hocine nous a accueillis avec un sourire timide, fier de nous montrer son quotidien. Nous avons apporté des pâtisseries, et des «  gazeuses », ( coca cola et limonade ). Karim, mon compagnon de route est très à l’aise, pour lui tout est normal , il est vraiment précieux pour moi ce rescapé de la misère de nos banlieues Parisiennes.

Sa mère préparait du thé à la menthe dans une petite pièce sombre où la lumière peinait à entrer. Les murs étaient nus, le sol froid, mais l’hospitalité était immense. Autour du thé, et d’une préparation à base de semoule,  les confidences ont commencé. Hocine nous a parlé de ses rêves : quitter la collecte des déchets, apprendre un métier, peut-être devenir mécanicien. Mais il sait que l’école coûte cher, et que son père, avec son maigre salaire, ne peut pas lui offrir cette chance. Le père lui rêve d’une voiture, rêve impossible bien entendu.

Dans la rue, nous avons croisé d’autres enfants comme lui, portant des sacs remplis de plastique ou de ferraille. Chacun avait son histoire, mais toutes se ressemblaient : survie, débrouille, espoir fragile. Le contraste avec les voitures luxueuses garées devant certains cafés était saisissant.

Nous  avons partagé un repas simple avec la famille : du pain, des olives, un peu de semoule de blé dur.. Ce fut un moment de chaleur humaine, où la pauvreté semblait s’effacer derrière la dignité et la générosité.

En quittant la Casbah, je me suis demandé combien de Hocine existent au Maroc, combien d’enfants portent sur leurs épaules un avenir incertain. Le pays regorge de richesses, mais elles semblent s’éloigner toujours plus des mains qui en auraient le plus besoin.

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