
Lorsque j'étais gosse , le samedi , mon père qui était musulman " à la petite semaine" m'emmenait au marché mais pas dans n'importe quel marché.
Il s’habillait comme pour aller à une noce et nous quittions sans bruit le bidonville. On prenait le bus puis le métro et , on se rendait à Barbès dans le quartier Maghrébin de Paris. Sur ce marché se trouvait un fruit merveilleux qui s'appelait la grenade .On y trouvait aussi des nèfles , la pitaya et autres épices dont le souvenir à totalement disparu de mon esprit . Pour mon père Barbés c'était Bougie , sa ville de Kabylie .C'était aussi sa sortie de la semaine et l'oubli de son labeur imbécile dans une usine à la con , ( il peignait des tubes au pistolet toute la journée ).Il en rêvait nuit et jour de son bled perché sur son monticule . Le marché comme tous les marchés était bruyant , coloré , odorant. Les prix variaient en fonction de la tête mais surtout de la capacité du client à ouvrir sa grande gueule ensuite , il m'emmenait dans un café et on sirotait peinard un thé à la menthe et une limonade en même temps.
Mon père qui avait oublié d'être un musulman régoriste et malléable buvait parfois de l'alcool en fumant une cigarette. C'était le fameux thé Irlandais. Le patron du bar ajoutait une dose de " ouisky " dans le chaud breuvage comme ça , le petit noir était baptisé . Puis , le père achetait tout ce qu’il y avait de moins cher vu qu’on était raide de fric le 20 du mois.
Je voyais aussi des drôles de filles qui avaient du rouge aux lèvres et du rouge aussi sur les ongles .Elles regardaient anxieuses dans un coin les hommes sur le trottoir .J’appris plus tard que c’était des filles plus que bien qui tentaient de sauvegarder de la misère humaine des gars célibataires qu’une houle trop forte avait rejeté sur les côtes de Provence .
Personne dans le bidonville ne mangeait , ne parlait du Halal. Cette mode était sans doute encore inconnue . On allait à la mosquée mais uniquement pour les grandes occasions. Et là , un grand moucheti nous racontait des salades à n’en plus finir. En sortant , mon père allumait sa clope et allait boire une bière , ( faut se remettre des émotions …)
Près de quarante ans plus tard , des barbus qui gagnent maintenant des milliers de milliards en imposant cette façon de consommer expliquent que tout doit être Halal et , des gens qui ne connaissent même pas le bled , sacrifient une partie de leurs maigres revenus à cette mode si lucrative.
Pourtant , je n’ai jamais lu dans le coran que tout devait être halal.
Jean Dutourd écrivait au bon beurre..
ps : très vite je suis devenu athée et pas qu'un peu ( grâce à dieu bien entendu ...)
addendum : bizarrement chez nous les poupées avaient de la gueule . Ma soeur en avait quelques une en chiffon. Mais bon ! On me dira que l'ange Gabriel est revenu sur terre pour faire des ajouts au bouquin.
Et tu verras beaucoup d'entre eux se précipiter vers le péché et l'iniquité, et manger des gains illicites. Comme est donc mauvais ce qu'ils œuvrent! » (Sourate al-Ma'idah. 62)