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Billet de blog 9 décembre 2008

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Blog d'un gamin de banlieue 4 : Crises et Banlieues

2005, émeutes à Clichy sous bois déclenchées par la mort de 2 jeunes, dont on apprendra plus tard qu'ils n'avaient rien de cambrioleurs comme l'annonçait-le shérif -...non comment dit-on en France déjà ? Ah oui...- le ministre de l'intérieur de l'époque, mais qu'ils ont pris peur face à des policiers chargés de les contrôler qui les ont poursuivis jusqu'à un transformateur EDF dans lequel ils se sont réfugiés avec les conséquences funestes que l'on sait.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

2005, émeutes à Clichy sous bois déclenchées par la mort de 2 jeunes, dont on apprendra plus tard qu'ils n'avaient rien de cambrioleurs comme l'annonçait-le shérif -...non comment dit-on en France déjà ? Ah oui...- le ministre de l'intérieur de l'époque, mais qu'ils ont pris peur face à des policiers chargés de les contrôler qui les ont poursuivis jusqu'à un transformateur EDF dans lequel ils se sont réfugiés avec les conséquences funestes que l'on sait.

S'en suit une vague de violence inédite depuis 1968 qui s'est propagée à travers tout le pays. Chacun y va de son commentaire et de son analyse... entre les délinquants instrumentalisés par l'Islam, l'Internationale des trafiquants de drogue voulant à tout prix reprendre le pouvoir dans les quartiers... on va même jusqu'à invoquer le fait que les émeutiers sont issus de famille polygames pour expliquer à la société que finalement ces "jeunes de banlieue" n'ont décidément pas les mêmes valeurs que nous autres.

Je me souviens que le premier ministre avait alors déclaré qu'il fallait que le calme revienne avant qu'on puisse dialoguer et ainsi lancer des mesures pour régler les problèmes. D'ailleurs il avait instauré un couvre feu.

2007, élections présidentielles. Dans un camp (à droite) l'omnicandidat parle de la banlieue à la fois pour stigmatiser les gens qui égorgent des moutons dans les baignoires, et les polygames (décidément...). Toutefois par souci d'équilibre (ou de drague) il promet un véritable "plan Marshall" pour les quartiers s'il est élu. Dans l'autre camp, l'omnicandidate ne prévoit rien de spécifique pour résoudre les problèmes dans les quartiers... à part l'encadrement militaire pour les jeunes délinquants, et tout de même des aides pour les femmes seules avec enfants.

La méfiance est de mise face à ces deux issues. Néanmoins les gens des banlieues ont reconnu le shérif...ministre de l'intérieur de 2005 derrière les traits du candidat de droite. Ni une ni deux, il faut l'empêcher de passer. Les habitants des quartiers sont nombreux à venir aux urnes, souvent pour la première fois. Ainsi, mères de familles, fils délinquants, parfois même en béquilles ou en fauteuil roulant avec deux balles dans la poitrine (j'exagère un peu), assaillent les bureaux de vote afin de s'assurer que le bonimenteur ne passera pas. Peine perdue le charme a déjà opéré auprès de la France non "polygame" (ça doit être une idée fixe).

Novembre 2007, émeutes à Villiers le Bel. Deux jeunes sont tués dans le choc entre leur moto et une voiture de police. Cet événement déclenche une vague de violence dans le Val d'Oise. Voitures et équipements sont incendiés, des policiers sont blessés par arme à feu. On pense s'acheminer vers un remake de Clichy sous Bois. Etrangement non. L'ancien ministre de l'Intérieur, devenu Grand Timonier de la République, déclare que ces événements ne sont pas dus à une quelconque crise sociale mais tout simplement à la "voyoucratie" et qu'on ne pourra discuter que lorsque l'ordre sera rétabli. Il envoie des compagnies de CRS (copié collé de 2005).

De toutes façons le gouvernement possède en son sein le symbole de la banlieue qui réussit : Fadela Amara qui doit alors annoncer un plan d'action sans précédent en faveur des quartiers, le fameux plan "antiglandouille" (dont la dénomination après Ni Putes Ni Ssoumises rehausse encore un peu plus la façon de considérer les habitants de quartiers dans l'imaginaire collectif).

Décembre 2008

Toujours pas vu les effets du plan antiglandouille. Par contre une crise systémique planétaire (c'est Jacques Attali qui le dit comme ça) se propage et commence à toucher les frontières françaises (là où même le nuage de Tchernobyl avait échoué). Partout dans le monde c'est la distribution de milliards de dollars ou d'euros afin de sauver le capitalisme et ceux là précisément qui ont provoqué la crise, tout en étant assez malins pour se rendre indispensables.

Même en France, 26 milliards sont prévus pour renflouer les petites et grosses entreprises, et on va même investir dans des projets qui traînaient dans des cartons depuis des années et qui étaient destinés à continuer leur lente moisissure, tout cela afin de soutenir l'activité. Le président de la République et les médias parlent de relance et même de plan de relance d'envergure!

Au moment où l'opposition est absente du fait d'un combat de boue entre Royal et Aubry (où Hamon et Peillon portent les serviettes), j'aurais juste une proposition à faire.

Serait-il possible que la relance inclue quelques milliards afin de retisser le lien social de ce pays et tenter vraiment cette fois de résoudre les problèmes des quartiers avec des solutions globales et historiques?

Si on pense aux conséquences économiques qu'on nous promet pour 2009, on peut légitimement être inquiet de l'impact social notamment pour des zones où s'accumulent pauvreté, désespoir et ressentiment. Si on ne fait rien à cette occasion, on aura alors des raisons de pleurer à la prochaine étincelle qui embrasera à nouveau nos quartiers. Mais voyoucratie ou pas, l'ordre sera de plus en plus difficile à ramener et on ne pourra pas dire que les événements de ces dernières années ne nous auront pas prévenus.

A moins que le status quo ne fasse partie de stratégies politiques pour 2012 auquel cas il est vrai qu'il est peut-être bon de garder la possibilité d'une émeute dans sa manche...

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