Tarek* est libyen. Il a fui la guerre en 2011. Quand il est interpellé pour un vol de bonbons et quelques gâteaux, gardé à vue puis envoyé en Comparution immédiate au tribunal de Paris, c’est avec une Obligation à quitter le territoire et une interdiction à y revenir. Il est alors sans domicile fixe.
Ce 19 mars, il comparaît libre pour s’expliquer. Le juge résume les faits : « vous cherchiez un abri pour la nuit, dites-vous, et êtes interpellé dans le local d’une banque du Crédit Mutuel, rue de Flandres, en possession de bonbons et de gâteaux. ». Ensuite, le magistrat ne cache pas les « 14 mentions au casier », l’interroge sur son travail, ses enfants et son hébergement puis donne la parole à la partie civile. L’avocat de la banque semble à son affaire et additionne les demandes d’indemnisation : pour la porte de l’agence « à réparer : 1689, 46 euros » ; « pour le préjudice commercial : 800 euros » (la banque a dû retarder son ouverture) et « 1000 euros au titre de l’article 475-1 du code pénal » (les frais de procédure). Quand le procureur en vient, lui aussi, à sa réquisition, il moque « la confusion entre la porte d’une banque et la porte d’un hall d’immeuble » et demande « 8 mois » de peine « sous surveillance électronique ».
On respire mieux quand les avocates (stagiaire et titulaire) rappellent l’itinéraire de Tarek, de la guerre en Lybie à la France et sa grande précarité. L’obligation à quitter le territoire est l’objet d’un recours et oui il est facile de confondre la porte de sortie de secours de la banque et celle de l’immeuble ; les avocates ont vérifié et transmis des photographies.
Après une longue attente, le verdict tombe : 6 mois de peine aménagée, la porte à rembourser et 700 euros à payer au titre de l’article 475-1. Le préjudice commercial n’est pas retenu, il n’avait pas été notifié dans la procédure.
Pour un vol de bonbons et de quelques biscuits dans une agence du Crédit Mutuel, parce qu’on fuit la guerre : il est vrai, aucune circonstance atténuante.
Nada
*Le prénom a été modifié.