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Billet de blog 29 février 2012

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Allocution du romancier et écrivain libanais Elias Khoury, lauréat du prix de l'UNESCO pour la culture arabe

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Mesdames, Messieurs,

Je vous suis infiniment reconnaissant. L’honneur de servir la culture arabe représente pour moi l’hommage suprême. En effet, j’ai toujours aspiré à être le mot qui ajouterait au dictionnaire de notre culture l’idée de l’intellectuel dont le rôle est de fonder les nouveaux miroirs et de permettre à la réalité de se refléter dans l’horizon du renouveau.

L’honneur que vous m’attribuez aujourd’hui me touche d’autant plus qu’il coïncide presque avec l’entrée de la Palestine comme membre à part entière à l’UNESCO. Nous sommes conscients que les signes de liberté s’esquissent d’abord dans le domaine de la culture, et la liberté de la Palestine fait partie de toutes les perspectives de liberté constituant aujourd’hui la voix qui secoue le Monde arabe dans son ensemble.

Ma génération a longtemps lutté pour fonder les valeurs de la liberté et de la justice, le mot était brandi en face de l’épée, il était notre arme contre les armes. Nombreux sont les amis qui sont tombés victimes, ceux qui sont partis sur les routes de l’exil et ceux qui ont connu les longues nuits de la prison. Or, nous avions rendez-vous avec la promesse de la liberté arrosée par le sang de Samir Kassir et ses compagnons. Nous avions longtemps attendu cette promesse dont les traits se sont esquissés avec le cri de la liberté qui, lancé depuis Sidi Bouzid, est parvenu jusqu’à Homs, là où les gens partent "à l'assaut du ciel", lavent de leur sang les eaux du fleuve al-‘Assi et clament leur victoire sur la mort, par le biais de laquelle, ils donnent naissance à notre liberté.

Aujourd’hui, je peux dire que notre conscience renaît grâce aux révolutions arabes qui nous apprennent la sagesse du courage et l’humilité de l’héroïsme.

La culture est l’enfant de la liberté, elle est aussi son épanouissement. Au sein de votre éminente assemblée culturelle, je ne peux que vous exhorter à la solidarité avec le sang qui coule à Baba Amr, je ne peux que m’incliner devant le spectacle qui se dessine sous mes yeux, celui des peuples arabes qui, en brisant leurs chaînes, retrouvent leur liberté et tissent de leurs révolutions un horizon culturel tout neuf.

Elias Khoury (texte traduit de l'arabe par Rania Samara)

Paris, le 27 février 2012

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