Mon papa était mineur ; moi, j’aime creuser.
Ces jours-ci en entendant les éléments de langage du gouvernement, je me suis rendu compte que leur langue était minée.
« Foule », cheminement démocratique », « meute », « légitimité », autant d’explosifs lancés par le Néron de la Somme pour discréditer le moment poétique, c’est-à-dire créatif, que nous vivons actuellement, autant de pétards mouillés.
Cette langue majeure, celle de la majorité présidentielle, invariante, sclérosée, anémique sémantiquement, pauvre si pauvre, désaffectée, cette langue prêt-à-porter, prêt à penser, j’ai eu envie d’y creuser des trous.
Et pour creuser ces mots comme on le fait en haute-couture, pour qu’ils soient bien ajustés à notre affect, j’ai choisi le plus grand des stylistes, le plus libre d’entre eux, Deleuze himself.
Oui, nous sommes une meute, mobile, mouvante.
Nous sommes ces « animaux davantage démoniaques, à meutes et affects, et qui font multiplicité, devenir, population, conte ».
Nous n’avons pas le pouvoir, nous sommes puissants, à la conquête d’un monde qui n’existe pas encore, imprévisible et désirable.
Nous ne cheminons pas, nous allons « à sauts et à gambades », insaisissables et donc dangereux pour eux.
Indociles, nous ne nous résignons pas à être policés, ni sages, si sages sont les membres du Conseil constitutionnel.
Notre désir collectif, s’il n’est pas légal, est légitime.
Nous nous échappons en lignes de fuite, réinvestissant le dehors, nous nous échappons de l’étalon-majoritaire pour...
Faire un usage créateur de la langue
Faire un usage poétique de notre présence au monde
« Nous ne sommes pas en face du capitalisme mais dans son monde (...) et dans ce monde, on essaie de creuser des trous, de les aménager et de les élargir. » (Rancière)
Le risque existe, celui de nous reterritorialiser. Nous le prenons, nous n’avons pas peur de l’échec.
« Déjà essayé. Déjà échoué. Peu importe. Essaie encore. Échoue encore. Échoue mieux. » (Beckett)
Mon papa était mineur ; moi, j’aime creuser.