De retour de l'île de Ré, je me suis souvenue de cet été.
En remontant du Lauragais, j'avait déjà fait une petite halte à l'ïle de Ré dans un camping municipal. Je craignais un peu l'agitation excessive, des soirées bruyantes, des gens parfois indélicats...Que nenni. J'ai passé un séjour tranquille parmi des campeurs naturellement prévenants, respectueux des lieux de vie communs comme de leurs occupants, loin des clichés véhiculés sur la France d'en bas. Dans la caravane d'en face, vivait une fratrie de naufragés qui m'intriguèrent lors de mon arrivée. Il s'en échappait des chants d'oiseau rare et une tête scratchée sur la vitre me poursuivait du regard constamment. Plus tard sortirent deux femmes à tête de moineau, deux hommes au sourire de simple, puis un gros garçon trisomique, un ménate en cage qui acclamait chaque promeneur d'un sifflement admiratif qui pouvait en faire rougir plus d'un. Je pensai qu'ils s'étaient échappés de Freaks, ce vieux film d'épouvante des années trente et je frémis un peu . Ils passaient le plus clair de leur journée à saluer les passants de l'allée en espérant un regard, un bonjour, un petit hochement du chef, comme pour vérifier leur existence.Je les adoptai comme voisin et ils s'en contentèrent. Adèle sympathisa avec une petit fille dont le prénom épousait mal ses sept ans: elle s'appelait Josette. Elle s'arrêta un matin en nous annonçant qu'aujourd'hui,elle se mariait. Comme preuve? Son sac à main en vieux cuir blanc, son short de mariée et son polo. Bon, il était orange, elle devait être d'origine ukrainienne.Le lendemain, elle arriva au petit déjeuner en exhibant un sac transparent rempli de liquide: un poisson rouge? Non, c'est mon petit frère qui a vomi. En la questionnant je découvris qu'il était tombé sur la tête, que ses parents étaient partis en courses et qu'elle l'avait allongé dans la caravane et s'en était occupé comme une petite maman. Trauma crânien. C'est la fin des haricots! Frères de l'inattendu, c'est ce que j'ai éprouvé dans ce camping derrière la dune, à peine fouettée par les oyas. Il suffit juste de relever nos pare-battages et de se laisser accoupler aux autres.