Les projecteurs sont braqués, depuis quelques mois, sur les violences envers enfants dans le secteur périscolaire parisien. Ces violences sont inacceptables, et doivent faire l’objet d’une réponse judiciaire, mais aussi politique et organisationnelle. C’est l’objet du plan de la ville de Paris contre les violences sexuelles faites aux enfants dans les écoles, rendu public le 14/11/2025.
La question se pose néanmoins de savoir pourquoi il y a plus de pédo-criminalité dans ce secteur que dans les autres secteurs mettant des professionnels en présence d’enfants. Sans compter que les affaires révélées à l’heure actuelle se concentrent sur les écoles maternelles, alors que les statistiques nationales montrent au contraire une plus grande concentration de pédo-criminalité en élémentaire*.
La principale raison est structurelle. Le secteur périscolaire est malmené par la ville de Paris depuis de nombreuses années : grande précarité (en partie illégale), manque drastique de formations, problèmes de recrutement, encadrement insuffisant des élèves à besoins éducatifs particuliers, absence de personnel formé pour le change des enfants dans les écoles maternelles, manque de postes ainsi que de reconnaissance des fonctionnaires, qui voient pourtant se multiplier les charges et les missions au fil des années, etc. Les REV en témoignent : beaucoup veulent quitter le métier alors qu’ils ont le statut de fonctionnaire !
Or, malgré les mobilisations du secteur, qui se multiplient et s’intensifient depuis novembre 2023, avec de nombreuses semaines de grève et de nombreuses écoles fermées sur les temps périscolaire, les défis structurels qui pèsent sur le périscolaire restent souvent invisibles aux yeux des parents – et pour cause : les équipes, tenues par leur devoir de réserve, ne peuvent pas toujours exprimer publiquement leurs préoccupations. Pourtant, leur mobilisation massive depuis deux ans n’est pas une lutte pour des privilèges, mais un combat pour préserver un service public de qualité, dans l’intérêt de tous – enfants, familles et professionnels !
En comprenant mieux ces enjeux, les parents pourraient voir que les revendications portées (conditions de travail décentes, moyens adaptés, reconnaissance des métiers) sont avant tout des garanties pour l’accueil et l’épanouissement de leurs enfants. Parce que derrière chaque grève, il y a des femmes et des hommes qui, malgré les contraintes, continuent de se battre pour un périscolaire digne : ils et elles méritent d’être entendu.es !
Nous, qui écrivons cette tribune, sommes parents dans différents arrondissements parisiens : le 11e et le 12e bien sûr, mais pas que. Grâce à leur mouvement, nous avons pris la mesure de la souffrance du secteur, et c’est la raison pour laquelle nous nous mobilisons depuis deux ans pour soutenir leurs revendications avec des lettres, des pétitions (https://www.change.org/p/avant-les-elections-municipales-l-avenir-du-periscolaire?source_location=search), des pique-nique solidaires, tâchant de motiver d’autres parents à faire de même.
Mais force est de reconnaître que cela n’est pas aisé, et nous en sommes arrivés ensemble au constat que, dans le regard des parents comme dans celui de l’institution, le périscolaire est le parent pauvre de l’école. Véritable symptôme des violences structurelles du système éducatif français, il ne fait pas pour autant réagir l'opinion publique, qui le relègue souvent au rang de simple “gardiennage d’enfant”, pendant que les parents sont au travail.
Le périscolaire est pourtant essentiel dans la qualité de vie à l’école de nos enfants, leur socialisation… sans oublier la découverte de nombreuses activités culturelles, en particulier pour les familles les plus pauvres, qui ont beaucoup recours au centre de loisir pendant les vacances. Les animateurs et animatrices protègent, rassurent, veillent, épanouissent, émancipent et font réfléchir nos enfants. Ils et elles les préparent pour le monde de demain.
Disons-le clairement : le périscolaire mérite la considération de toutes et tous. Et, parce que le service public, c’est notre service, nous sommes légitimement en droit d'exiger de la ville un arbitrage budgétaire en faveur de choix forts, structurels, profonds, pour une amélioration du statut, de la formation, de la reconnaissance, ainsi que des conditions de recrutement et de travail dans ce secteur !
Sans notre soutien, nous aurons, en guise de réponse politique à cette crise, principalement des mesures de surface, de communication, comme c’est déjà malheureusement le cas. Certaines mesures du plan de la ville s’avèreront contre-productives et risquent de décourager de nombreu.ses agent.es investi.es et expérimenté.es.
Aujourd’hui, il est temps que la Ville et des élus prennent des décisions courageuses en faveur d’un périscolaire revalorisé! Ils et elles prennent soin de nos enfants, c’est à nous de prendre soin d’elles et eux!
(*enquete IPSOS/BVA du 07/10/2019 : 10 ans : l'âge moyen des premières violences sexuelles)
Signataires :
Angélique BENASAYAG, Représentante parents d'élève, PEPS (École élémentaire PICPUS B, 12e)
Adeline CHAGNEAU, Représentante parents d'élève CL FCPE (École élémentaire Froment, 11e)
Nicolas ALBERTI, Représentant parents d'élève École élémentaire, CL FCPE (57 Reuilly B, 12e)
Perrine MALKA Représentant parents d'élève, CL FCPE (École Maternelle 59, Reuilly, 12e)
Latifa YAKOUBI, Représentante parents d'élève liste indépendante (École Maternelle 69 Championnet 18e),
Caroline ZEKRI, Représentante parents d'élève, liste indépendante (École élémentaire Michel Bizot, Paris 12e),
Pierre-Emmanuel HAENSLER, Représentant parents d'élèves FCPE (École élémentaire Reuilly B,12e),
Raphael BAROUX, Représentant parents d'élèves, FCPE (19 rue Marsoulan, 12e),
Sylvie Alriquet, Représentante parents d’élèves FCPE (Ecole Elementaire Marsoulan, 12e)
Pauline FAURE-VILLE, vice présidente CL FCPE (école Montempoivre, 12e)