Le pouvoir, ici comme ailleurs, s’est laissé contaminer de longue date par l’extrême droite, le processus est d’infusion lente. Mais il connaît ces derniers temps une accélération folle : les lois racistes et liberticides jubilent de se décomplexer, de pousser l’audace chaque jour un cran plus loin. Impossible même de les énumérer, les paliers se franchissent trop allègrement, le mouvement s’est emballé, et, avec nos cerveaux bassinés de courbes prédictives, il n’est pas compliqué de lire le dessin que tracent les pointillés de l’avenir.
Le capitalisme brûle d’abattre les rares digues qui le retiennent encore, déjà prêt à tuer et mutiler en manif, aux frontières, dans les hôpitaux, dans les entrepôts. Prêt à abandonner toujours plus de gens sans manger et sans soins. Prêt à réduire toujours plus les miettes accordées à la protection collective. Prêt à assumer le banditisme, l’échappée du pouvoir hors des lois, dans le même temps où on criminalise n’importe qui pour n’importe quoi. Prêt à transformer sa police en milice sans limite de droit, et n’importe quel gugusse en sous-flic aboyant des ordres pour protéger choses et prédations sans fin.
Dans un grand rire, ivre de lui-même, le capitalisme achève de prendre le pouvoir, appuyé par la police et l’extrême droite. Un grand rire fou et malade, qui joue avec l’idée de la destruction comme le dictateur de Chaplin avec son globe-ballon, jouissant à ce point du pouvoir que celui de faire disparaître jusqu’à la possibilité de l’humain et de la planète habitable lui apparaît naturellement comme un aboutissement, ou à tout le moins comme un risque stimulant.
Macron finit de nous révéler, s’il en était besoin, la parfaite continuité qui relie l’extrême droite et le capitalisme. Le capitalisme a besoin de l’extrême droite pour arriver au pouvoir et pour s’y maintenir. Le capitalisme est séduit par l’extrême droite, son absence de scrupule, son langage pervers, sa chosification de l’humain, sa haine du vivant. Il frissonne d’excitation à se laisser entraîner par elle qui se donne tous les droits. C’est dans sa nature, on le sait, lui qui naît avec l’esclavage et a poussé jusqu’à l’exploitation industrielle de l’humain-machinisé bientôt transformé en rebut. Là le mène la loi du profit maximum, de fait. L’extrême droite est pour le capitalisme un penchant, une tendance, une question de tempérament ou de circonstances, un visage.
Il faut leur arracher le monde avant qu’il ne soit trop tard, par tous les moyens à notre disposition.
Entre mille autres, aujourd’hui : à quand la grève massive des théâtres, cinémas, librairies, musées ? Que la beauté et le sens fassent sécession du marché et rejoignent la rue, l’arrêt, les corps en lutte.