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Billet de blog 6 février 2018

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Oscar du bon sentiment. Olympisme de la Raison

De quelque obédience ou nationalité que nous soyons, il existe encore, et peut-être heureusement, ou pas, quelques grands-messes qui nous réunissent. Evénementielles, sportives, culturelles, mortuaires, commémoratives…

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Oscars du bon Sentiment

Olympisme de la Raison

A haute teneur symbolique. Ou simplement récréatives et ludiques. Ces occasions rares de communion, au sens de faire corps avec son voisinage, restent parmi les dernières opportunités de se représenter l’Humain à travers la désignation d’un groupe social réellement hétéroclite, et, malgré cela, en apparence : positivement perçu. Exceptionnellement pluri-incarné et multi-soudé. En une communauté, pour une fois, concrète et palpable. Hors-frontières. Et globalement, relativement « pacifique ». Mettant du moins de côté, pour un temps, les hooliganismes, et les intolérances de chacun.

En France, c’est par exemple l’effet « Black-blanc-beur » de la coupe de 1998.

Aux USA, le Superbowl, et ses 100 millions de téléspectateurs-fans de pubs inédites, de concerts pop chorégraphiés au millimètre, et de yards gagnés chèrement à coups d’emplafonnements virils. Bien au-delà des races, ou des classes. Trumpiens et anti-trumpiens, reptiliens et non-reptiliens, auront également apprécié en famille : canapé, chips, tacos, bières, coca, pizza, touch-down et empoignades sanglantes. Hispano. Negro. Wasp… Peu importe. Un peu comme dans la nature, lors du combat de deux mâles dominants pour le contrôle du harem, le reste de la harde assiste, éberlué, voir interdit, à l’éventualité d’une profonde restructuration hiérarchique qui impacterait forcément chacun des membres.

C’est éthologique !

Ce week-end verra ainsi l’événement-non-événement politique le plus important de ces dernières années, en la présence conjointe, en une seule délégation, des athlètes nord et sud-coréens aux J.O. d’hiver. Soixante ans après la guerre. Et à l’orée d’une autre, prévue par Damoclès. Une réunification improbable se dessine, comme une trace de patin à glace sur une piste encore vierge, laissée par une frêle adolescente en tutu rose. Gracieuse. Une entente, toute relative, voir une caricature juvénile, se profile derrière l’hystérie nucléaire qui baigne nos climats géostratégiques caractériels.

De même, le tout Hollywood ; tout le gratin des méga-Media-artistes américains ; se retrouvera bientôt pour cracher dans la soupe de la politique étatsunienne. Et sur Trump : leur cible favorite du moment. Lui, en particulier, méritant plus que tout autres d’être l’objet de nos indignations sélectives. Le pauvre !... Si ce n’est pas malheureux d’être l’homme le plus puissant de la planète, et d’être relégué de la sorte à un rôle de punching-ball, et d’exutoire de toutes les colères, de toutes les angoisses et de tous les mécontentements du moment. « Impeachment ! », entendra-t-on crier entre les lignes. « Hillary back ! »… Et, comme d’habitude, fière de sa bonne conscience universaliste, et consciente d’être un phare universel voué à tous nous éclairer, jusqu’à bon port, la bonne société hollywoodienne, majoritairement « Démocrate », ou disons clintonienne, va donc faire étalage de sa sirupeuse éthique unidirectionnelle. Vomir son dégoût en diverses scénettes, plus ou moins comiques ou sort-ton-mouchoir-que-j’te-tire-la-larme, calibrées au poil de dinde, comme une danse de Timberlake ou de Bieber, qui raviront les esprits perturbés des uns et des autres.

Damon, Clooney, Di Capprio, Weather, Portman... Et peut-être même Rihanna, accompagnée par DJ Khaled (et son fils de 3 ans, l’élu : « Prince of Instagram »…), viendront sur scène pour nous faire réagir à la malfaisance du système qui semble se mettre en place sous nos yeux ahuris. Ils dénonceront courageusement les effets dévastateurs d’une politique dont ils sont pourtant les dignes représentants. Les hérauts ou héros. Les premiers bénéficiaires. VRP de luxe, nous voyant vaches-à-lait, ou graines de yachts, ils sauront nous distiller les prêches enflammés qui nous rappelleront que nous ne sommes pas seuls. A nous poser des questions. A douter. Eux, « les VRP, et premiers bénéficiaires du dit « système incriminé », sauront nous convaincre par leur verve, et leurs talents hors-paire d’orateurs et d’acteurs, de la nécessité de rallier la seule cause qui vaille : la leur.

Le consensus, s’étalera là, sous nos yeux admiratifs. Comme s’allonge un naturiste au Cap d’Agde, sous les yeux de voyeurs impatients et concupiscents.

Tout-e-s excité-e-s…

Si Oprah est là, elle présidentiabilisera encore une fois. Si Woody Allen est là, il se fera tout petit. Si Hollande est là… Lui aussi !...

Et nous aurons donc notre lot de bien-pensance, et de modes d’emploi divers pour sauver la Planète des fléaux qui la guette. Nous réfléchirons ensemble, pour une fois, sur notre avenir commun. En profitant des soins de décryptage, et d’épilation du maillot, que nos stars chéries nous prodiguent, pour éviter que nous ne basculions tous dans le chaos ambiant. Dans le radicalisme, le complotisme, la violence, ou la simple irrévérence incorrecte... Musk, Gates, Zuckerberg, Soros, Weinstein et beaucoup d’autres ne seront sans doute pas là. Mais seront bien représentés quand même. L’altruisme, l’humanisme et la philanthropie, purs, feront briller les yeux de tous. Eructer d’émotion. Et verser quelques larmes. Des hommages seront rendus. A ceux qui le méritent. Pas aux autres. Qui, eux, seront hués. « Hou ! Salaud ! ». Ça vibrera. Ça explosera de joie, d’emphase et de rire, pour finalement achever tristement l’immense, et redoutable, ambition de faire comprendre au plus grand nombre possible, où est le : Bien. Et où est le Mal. Littéralement. Ou latéralement, si besoin.

Ces grands-messes nous sont donc indéniablement nécessaires. En l’absence de ce type de manifestation, nous ne serions pas capables de nous considérer nous-mêmes. De bien nous représenter que nous ne sommes en définitive qu’une, pathétique autant qu’holistique, seule et unique : Race Humaine.

Enfin, mis à part, les auto-désignées « victimes », comme le « pauvre Trump », ou Woody, ou Kevin, ou Harvey… des #Metoo ; qui eux seront bannis et conspués. Désignés à la vindicte en guise de catharsis des schémas proxénètes. Et structurels.

« Nous », si toutefois ce pronom personnel porte encore un sens, serons devant nos postes. Non de vigie, ou de combat. Mais de télé. Encore une fois. Pour constater combien, en effet, il est souhaitable de réfléchir à : comment faire corps ? Tous. Ensemble. Et : individuellement. Par nous-mêmes. Comme il nous faut méditer, par devoir, de croyants-pratiquants, pour ceux qui le sont, à la sortie de l’office, après sermon du prêtre, du pasteur, du rabbin, ou de l’imam, la façon d’interpréter au mieux, et de mettre en pratique, à bon escient, toutes ses belles paroles.

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