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Billet de blog 8 décembre 2018

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Au sujet de la police et des inexcusables jets de falshball et de grenades GLI-F4

L’utilisation répétée des jets de flashball dangereux, mutilants, voire mortels est inexcusable et cela doit être dénoncé de façon ferme et audible. Ce n’est pas encore assez le cas ! Or le phénomène qui est en train de s’amplifier ne date pas d’aujourd’hui.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Depuis longtemps à présent, nous assistons à un durcissement de la répression policière autour de manifestations. Est-elle justifiée? Je vais donner des exemples que j'ai vécu, et qui sera un coin de réponse personnelle à cette question. 

Lors des Nuits debout, au quinquennat précédent, j'ai vu, depuis le café au coin de la rue de Malte et de la rue du faubourg du temple où je prenais un pot avec des amis, un homme isolé, en noir, cagoulé, sortir de la rue de Malte. Il est allé vers une mini garée sur le trottoir, a cassé la vitre, a mis le feu à la voiture, et il est reparti rue de Malte. Le lendemain, les photos de la voiture brûlée montrait les débordements des nuits debout. Tous les quotidiens y ajoutaient leur voix. Comment ne pas honnir cette presse qui décrédibilise un mouvement sans preuve, sans enquête, jouant uniquement sur  le choc des images? 

J'ai participé à de multiples manifestations depuis le début du quinquennat du président Macron. Lors de l'une d'elle, les CRS ont bouché l'avenue où était la manifestation. Des kilomètres de manifestants ont été bloqués plusieurs heures sans pouvoir avancer sur Nation. J'étais devant. La manifestation s'est assise par terre, dans la rue. A un moment, alors qu'il y avait des enfants parmi la foule, les CRS ont commencé à nous torpiller de grenades. C'était juste insupportable. Le premier cordon a pourtant tenu, dans la fumée, et attendu patiemment que l'avenue se débloque. Ensuite, pour aller aux manifestations, nous nous sommes équipés de plus en plus d'écharpes, de blousons de cuir. Je n'ai jamais vu, au cours d'une de ces manifestations, des faits de violence avérées. Au contraire, les ambiances étaient bon enfant, avec des musiciens, des slogans inventifs, les gens se parlaient. Et les policiers nous ont torpillés de la même façon. 

La presse nationale a joué le jeu du pouvoir en montrant des "images chocs" afin de décrédibiliser les manifestations populaires. Même à deux rues des évènements, les gens croyaient "la presse" et pas ce qui s'était passé réellement juste à côté. 

Un soir, en sortant de mon centre d'animation, j'ai vu la rue de Chateau Landon bloquée par des CRS. Nous avons été retenus, à dix heures du soir, plus d'une heure dans la rue. Des dizaines de cars de CRS étaient stationnés d'un côté et de l'autre de la rue. Pourquoi? Je croyais qu'il y avait des terroristes quelque part. Non. Quelques lycéens du lycée Colbert avaient décidé de se réunir le soir dans le lycée pour parler politique. Ils sont sortis, hébétés, au milieu des CRS. Cela a même fait l'objet d'un petit article dans l'Humanité. 

A présent, la police n'hésite pas à mettre en garde à vue plus de 24 heures des lycéens qui mettent un tag sur un panneau en plastique. Elle tire en balles directes sur les lycéens, au risque de les défigurer ou provoquer des blessures irréversibles? 

J'ai vu, d'années en années, de manifs en manifs, la répression policière passer des caps, qui devenaient "normaux" avant le cap d'après. Ce qui se passe aujourd'hui n'est plus du tout normal. 

 En Mai 68, le préfet de Paris a tout mis en oeuvre pour que les étudiants ne soient pas blessés. Parce "ce sont nos enfants". Faut-il comprendre qu'aujourd'hui, les lycéens visés ne sont plus "les enfants" de ceux qui manoeuvrent les bras de la police? Faut-il comprendre que les "enfants" des dirigeants ne peuvent pas être parmi ces lycéens parce qu'ils sont dans des grands et luxueux lycées privés et non dans les gourbis publics? Est-ce cela qu'il faut comprendre? Et que tirer sur les enfants de ceux qui ne sont rien n'est pas non plus grand chose?

On peut faire raconter aux images n'importe quoi. Si la police tire d'abord, et que la foule s'enflamme après, on peut toujours faire dire aux événements que cela s'est passé dans l'autre sens. Il est sans doute paniquant et difficile aujourd'hui pour les forces de l'ordre de voir arriver des foules de manifestants, je peux bien l'imaginer. Mais utiliser des balles DIRECTES sur la foule revient à lui tirer dessus. Ce n'est pas mettre de l'ordre, c'est faire une action qui doit se juger au pénal. Or les CRS sont bien protégés. Et difficiles à reconnaître. Difficile d'isoler celui qui a tiré une balle directe et qui va se retrouver responsable d'un dégât majeur, impactant ensuite une vie entière, ou l'annihilant. Dans ce cas, ce n'est pas un fait de police, c'est une mutilation, c'est un meurtre.  

Le président Macron a doté la France, avec nos impôts, d'armes qu'il vend sur les différents marchés mondiaux. Je suppose que c'est une fierté. Je pense que son engouement pour les armes, son mépris pour le peuple, les dérives inexcusables de la Police et des CRS doivent être rapprochés, à l'heure où les gilets jaunes avancent avec détermination et courage. 

Ce n'est pas parce qu'un policier est un bras armé qu'il n'a pas encore une conscience. Chacun est responsable de ses actes. Je demande aux policiers de mesurer qu'ils tirent sur des humains. Sur des frères, des soeurs, des mères, des pères. Sur leurs enfants. 

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