On peut se raconter les histoires que l’on veut, cette élection est une défaite pour l’écologie politique, EELV et le Pôle écologiste. Non seulement nous perdons des électrices et électeurs par rapport aux européennes et régionales, mais nous faisons même moins que Noël Mamère en 2002 et le total Yannick Jadot + Anne Hidalgo est plus faible que celui de Benoit Hamon en 2017.
On peut accuser le contexte, les médias, les campagnes concurrentes. Une large part de ce piètre score réside sans doute là-dedans. Mais que pouvons-nous y faire ? Rien. Pour ne plus subir les défaites, nous ne pouvons agir que sur nous-même, notre manière de faire de la politique, de faire campagne. Les faits sont là : les régionales étaient déjà décevantes et aucune leçon n’en a été tiré, Jean-Luc Mélenchon a réalisé la même campagne qu’en 2017 et aucune leçon n’en a été tirée…
Je vous propose dans ce billet, écrit à chaud, de tirer des premières leçons de cet échec. La première leçon est sans doute étrange : la candidature de Yannick Jadot était la bonne. Il n’y avait pas de meilleurs choix lors de la primaire. Il fallait une candidature sérieuse et qui sache distinguer l’écologie du reste de la gauche. Le candidat que j’ai soutenu lors des primaires, Eric Piolle, aurait été moins capable de faire cela, et je suis persuadé qu’il aurait été d’autant plus siphonné par Jean-Luc Mélenchon qu’il en était moins distinguable.
La deuxième leçon est qu’à campagne parisienne, score d’écolo parisien. J’ai pendant cette campagne plusieurs fois demandé à différentes personnes si elles avaient déjà gagné des élections et à chaque fois on me répondait « Oui, j’étais là lors des européennes ». 13%, ce n’est pas une victoire, gagner, dans l’adversité et sur deux tours, sa grande ville ou son village, son canton ou sa métropole… ça, c'est une victoire, moins prestigieuse, mais nettement plus instructive. Au lieu de faire une campagne représentative des motions historiques, partis du pôle écolo et des résultats de la primaire, il aurait sans doute fallu en faire une représentative des différentes cultures de la gagne et des expériences acquises dans les situations de leadership. C’est aussi une leçon à tirer pour le futur congrès et l’avenir du mouvement. Et je le dis d’autant plus facilement que je n’ai jamais gagné d’élections, on a fait 24% (au premier tour) aux municipales en autonomie dans ma ville de 30 000 habitants, un beau score aux régionales… mais gagner je ne sais pas faire parce que je ne l’ai jamais fait.
La troisième leçon est que, justement, on devrait plus souvent tirer des leçons. Jean-Luc Mélenchon a fait un copié-collé de sa campagne de 2017, il finit avec un score tout à fait semblable, une grande partie de notre électorat a « voté utile » et nous n’avons que nos yeux pour pleurer et nos calculettes pour espérer sauver les meubles aux législatives. Qu’avons-nous appris en 5 ans ? Qu’avons-nous fait pour éviter une redite de 2017 ? Manifestement pas grand-chose. Mélenchon a, comme en 2017, fait une campagne simple : des réunions publiques, du porte-à-porte, du tractage, pas de « soupe aux logos » qui nécessite des négociations chronophages, mais plutôt du débauchage individuel, une large place à la société civile organisée… Bref, quelque chose de pas très original, de pas très « fun » mais de très efficace. Alors oui, nous, nous, avons joué à fond les élections intermédiaires, nous n’avons pas son expérience, son argent ou son armée de collaborateurs parlementaires… nous n’aurions donc pas pu faire aussi bien de toute façon, mais j’ai un peu l’impression que nous avons fait tout l’inverse (comme Hamon en 2017). D’ailleurs, une autre campagne qui fait un excellent score ce soir (comme en 2017), c’est celle de Macron et elle repose sur les mêmes éléments que celle de Mélenchon.
D’autres leçons peuvent être tirées (sur l’absence totale de travail sur les outre-mers ou sur l’impact électoral inexistant de l’existence pôle écolo[1]) mais elles me semblent moins importantes que ces trois là.
Il faut maintenant se concentrer sur les échéances à venir, rester solide et solidaire et tout faire pour faire rentrer un maximum d’écologistes à l’Assemblée, y compris en considérant que l’ère post-Mélenchon de la France Insoumise doit nous amener à repenser les frontières de l’écologie politique française[2].
Nathan Guedj,
Co-secrétaire d'EELV Rhône et candidat du Pôle écologiste dans la 5e circonscription du Rhône (en attendant un accord de désistement mutuel avec les forces de gauche, LFI compris et LFI surtout, que j'appelle de mes voeux)
[1] Ce qui ne veut pas dire que je suis contre, dans un certain nombre d’endroits il apporte une présence militante nécessaire et une diversité de profils enrichissante pour l’écologie politique
[2] Par exemple en quoi une Mathilde Panot ou une Clémentine Autain auraient moins à dire dans la refondation d’un large mouvement de l’écologie politique française que des personnalités actuellement parties prenantes du pôle écologiste ?