Plusieurs fois reportées pour de bonnes et, surtout, de mauvaises raisons, les assises devant permettre à l’Union Nationale (UN) de renouveler son directoire auront finalement lieu le 13 novembre prochain. Après des mois de tension, d’invectives et de coups bas, les militants du principal parti de l’opposition gabonaise vont, enfin, pouvoir désigner celle ou celui qui succédera au président sortant Zacharie Myboto. Avant l’entrée en compétition de Paulette Missambo, par ailleurs Vice-présidente de l’UN, la voix semblait toute tracée pour le Secrétaire exécutif adjoint Paul-Marie Gondjout qui se voyait déjà à la tête du Parti.
Mais en quelques semaines, la belle assurance de l’époux de Chantal Myboto a fait place à une très grande fébrilité. Entre causeries mal préparées et dérapages oratoires en série, le gendre de Zacharie Myboto n’a eu de cesse de multiplier les sorties de piste ces derniers temps. Et comme si cela ne suffisait pas, voilà que le sort semble s’acharner sur lui avec cette annonce faite par des médias en ligne au sujet de son mentor Zacharie Myboto. Selon ces publications, le futur-ancien président de l'UN serait malade du Covid 19 et devrait donc manquer le congrès de samedi prochain.
Si ce n'est pas un canular, alors c'est un signal qu'il faudrait prendre très au sérieux. Car cette information appelle au moins deux lectures. La première nous est livrée par un cadre de l’UN qui a travaillé pendant de très nombreuses années sous les ordres de Zacharie Myboto à l’époque où ce dernier était ministre. « A 83 ans aujourd’hui, cet ancien Secrétaire administratif du PDG peut parfaitement jauger les chances des candidats à une élection à quelques jours du scrutin. Dans le cas de l’UN, M. Myboto sait qu'en dehors de la province du Moyen Ogooué et du 1er arrondissement de Libreville qui comptent en tout et pour tout 116 délégués, son gendre Paul-Marie Gondjout ne peut gagner nulle part ailleurs. Même pas dans le Haut-Ogooué où les militants préfèrent accorder majoritairement leurs suffrages à un enfant du terroir, Éric Myboto candidat sur la liste de Paulette Missambo. Par ailleurs, en venant lire un discours clairement en faveur de Paul-Marie Gondjout, le président Myboto vient de commettre la faute fatale. Il montre à la face du monde son engagement pour la monarchisation, la dévolution dynastique et la familiarisation des instances du parti. Personne n'est dupe, tous les militants savent que c'est le combat que mène le président depuis 2010. »
En effet, et c’est tout le sens de l'affront que ces mêmes militants ont infligé à Zacharie Myboto lors du congrès de décembre 2020. Alors qu'il s'attendait à quitter la salle sous les acclamations, l’ancien député de Mounana a longuement été conspué par les congressistes qui l'accusaient d'avoir voulu procéder à une dévolution familiale du pouvoir au sein du Parti. Toutes choses que les Gabonais dans leur immense majorité reprochent au pouvoir Bongo-PDG.
Dans cette ambiance de suspicion et d’extrême méfiance, certains ne sont pas loin de penser que la sortie intempestive et inattendue du patriarche Myboto qui aurait mieux fait de ne pas prendre parti dans cette compétition qui oppose l'époux de Chantal à Éric, son propre fils, est la preuve qu'il s'agit vraisemblablement d'une « maladie diplomatique », au moment où tous les pronostics donnent Paulette Missambo victorieuse samedi prochain. On n’ose pas imaginer le traitement que les congressistes, gagnés par l'euphorie de la victoire de cette dernière, pourraient alors réserver à leur ancien président.
Maintenant, si la maladie est réelle, ce serait également un autre mauvais présage. Et c’est là qu’intervient la deuxième grille de lecture. « Jamais deux sans trois », dit l'adage. Le Covid 19 a déjà emporté deux éminentes personnalités du camp Missambo pendant la très longue campagne électorale : Casimir Oye Mba et Marie-Agnès Koumba. Il n'est donc pas exclu que le mauvais sort qui semble avoir pris rendez-vous avec l'Union Nationale, essaie de faire dans « l'équilibre ». Ce qui serait une véritable catastrophe pour « M. Gendre ».
En attendant, le candidat Paul-Marie Gondjout accumule les mauvaises nouvelles. La dernière en date : la fuite sur l’origine des fonds devant servir à financer le congrès du 13 novembre. Selon plusieurs sources concordantes, Ali Bongo aurait passé un deal avec les Myboto pour « aider l’UN à organiser son congrès dans de bonnes conditions ». Il faut noter qu’une partie de l’argent aurait servi à financer la campagne interne de Paul-Marie Gondjout dont les équipes ont vite trouvé la formule pour justifier ce renflouement soudain des caisses : la vente d'un terrain hérité de Gondjout père. Ainsi, Paul-Marie Gondjout, incapable de verser le moindre centime pour le congrès initialement prévu le 15 octobre dernier, se retrouve subitement à médiatiser le versement de sa contribution pour un montant de plus de 27 millions de francs CFA. De plus, il a entrepris, dans le même temps, une vaste opération d'achat de consciences au sein du Parti. Certaines indiscrétions font état d'importantes sommes d'argent remises à quelques coordonateurs communaux du Woleu-Ntem, du Haut-Ogooué et d'arrondissements de Libreville. On parle, par exemple, de 5 millions remis à chacun des deux coordonnateurs du Grand Nord, en l’occurrence Urbain (Oyem) et Agathe Ntsama (Bitam) pour « motiver » les congressistes. Aux dernières nouvelles, les deux responsables provinciaux auraient fait main basse sur le magot. A l’image d’Agathe Ntsama qui déclare à qui veut l'entendre qu'elle « ne fera plus la politique les fesses nues » (sic !). Son favori Paul-Marie Gondjout appréciera !
Dans tous les cas, la journée de samedi promet d’être animée à l’UN…