Nicolas Condom (avatar)

Nicolas Condom

Abonné·e de Mediapart

32 Billets

0 Édition

Billet de blog 1 novembre 2008

Nicolas Condom (avatar)

Nicolas Condom

Abonné·e de Mediapart

Entretien avec Marc Abizeid, porte-parole de Ralph Nader

 Entretien avec Marc Abizeid, porte-parole de Ralph Nader, qui prédit une victoire de Barack Obama, et défend la candidature de son candidat accusé en 2000 d'avoir fait perdre Al Gore.

Nicolas Condom (avatar)

Nicolas Condom

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Entretien avec Marc Abizeid, porte-parole de Ralph Nader, qui prédit une victoire de Barack Obama, et défend la candidature de son candidat accusé en 2000 d'avoir fait perdre Al Gore.

(Entretien réalisé pour LaTeleLibre.fr)

Comment se déroule votre campagne ? Comment est-elle accueillie par les Américains ?


Les Américains accueillent bien cette campagne dans la mesure où ils ne sont pas satisfaits, dans leur majorité, du système bipartisan actuel. Un récent sondage montrait que plus de 60% d’entre eux n’en étaient pas satisfaits. La situation est paradoxale : les gens veulent plus de choix, mais nombreux sont ceux qui, tout en approuvant nos idées, nous demandent de ne pas nous présenter, par peur de causer une défaite des démocrates lorsque les résultats sont serrés.
Mais si l’on regarde les résultats actuels, Barack Obama dispose d’une large avance sur John McCain, avance qui existe malgré les 5% donnés au ticket Nader/Gonzales. Ralph Nader a aussi servi de bouc émissaire aux démocrates en 2000. De nombreux éléments jouaient pourtant en leur faveur, et leur auraient permis de faire face à la décision arbitraire de la Cour Suprême de suspendre le décompte des voix en Floride. Al Gore, au niveau national, avait 500.000 voix de plus que George W. Bush. Ensuite, on a constaté de nombreuses irrégularités : une part consistante d’électeurs a voté pour Pat Buchanan, le candidat d’extrême-droite, croyant voter pour Al Gore, en raison de l’irrégularité de certains bulletins, et leurs voix n’ont donc pas été comptées.

Que répondez-vous aux personnes du monde entier qui craignent une victoire de John McCain en raison de la présence dans certains Etats du ticket Nader/Gonzales ?


Comme je l’ai dit, en 2000, Ralph Nader a servi de bouc émissaire aux démocrates qui n’ont pas su tenir face à la Cour Suprême, organiser des manifestations suite à la décision d’arrêter le décompte alors que tout leur donnait raison. Que les Républicains ont été aidés par le fait que Jeb Bush, le frère du candidat républicain, était gouverneur de Floride… Les Américains veulent plus de diversité : cela signifie-t-il que nous devons refuser ce droit que nous offre la constitution, qui ne nous oblige pas à avoir le système bipartite actuel ? Peut-être devrions-nous avoir un système en deux tours, comme en France. La question est ouverte.

Pourquoi êtes-vous présents seulement dans 45 Etats ?


Alors que les deux principaux partis sont inscrits automatiquement, les partis tiers ont des conditions parfois restrictives : avoir la signature d’un certains nombre de citoyens de l’Etat. Mais certains Etats refusent la signature de personnes issues d’autres Etats, tandis que d’autres n’acceptent pas la signature, par exemple, de personnes ayant voté aux primaires républicaines ou démocrates. Le parcours est donc semé d’embûches.

Ralph Nader ne peut pas gagner cette élection. Quel rôle veut-il jouer ? Quels résultats attend-t-il ?


Les sondages actuels nous donnent 3 à 5%, soit le score le plus élevé pour les candidats tiers. Bob Barr, le candidat libertarien, fait un score plus réduit que ne l’aurait fait Ron Paul, autour duquel il y a un vrai culte de la personnalité, et qui soutient d’ailleurs Chuck Baldwin, un autre candidat de droite. Notre but est de faire le plus de bruit possible : peu de personnes défendront les idées que nous défendons une fois que la période électorale sera terminée. Par exemple, nous savons que les démocrates ne mettront pas de terme aux guerres en Irak et en Afghanistan, ne vont pas mettre en place un système d’assurance maladie universel. Grâce au plan de Barack Obama ce sont les hôpitaux, l’industrie pharmaceutique, qui recevront de l’argent, mais le coût des soins ne sera pas baissé.
C’est donc le meilleur moment pour défendre ces idées. Nous avons assez de soutien pour les défendre et faire en sorte qu’elles soient adoptées par les grands partis. Les droits civils ont été adoptés de cette façon dans les années 60, et c’est un républicain, Richard Nixon, qui a mis fin à la guerre du Vietnam. Rien de tout cela n’aurait été possible sans les mouvements des années 60. Nous entendons jouer ce rôle de porteurs de flammes, d’agitateurs d’idées.

(Nader et son colistier, Matt Gonzales)

Que pensez-vous de l’avance actuelle de Barack Obama dans les sondages ? Croyez-vous en un « effet Bradley » (le fait que certains blancs disent qu’ils vont voter pour un candidat afro-américain aux sondeurs, mais décident, dans le secret de l’urne, de voter pour le candidat blanc) ?


Cette question est pertinente si on voit les primaires du New Hampshire : les sondages indiquaient une large avance pour Barack Obama, qui a fini second. Mais Obama va probablement gagner : il est en tête dans les sondages et va profiter de la crise économique qui a provoqué le plan de relance de 700 milliards de dollars, auquel Ralph Nader s’est opposé car il utilise l’argent des contribuables pour notamment faire une baisse d’impôts de 150 milliards aux plus aisés. La réaction de certains républicains qui ont rejeté le premier texte est d’ailleurs étonnante, même si compréhensible. Ils savaient qu’il y aurait un second vote. Il s’agissait pour eux de sauver les apparences, car les élections approchent et la majorité des électeurs y était opposée.

Quelle est la conception générale de la politique étrangère de Ralph Nader ? En quoi se distingue-t-elle des autres candidats ?


John McCain et Barack Obama ne mettront pas terme aux guerres d’Irak et Afghanistan. Nous voulons remplacer la politique étrangère agressive de ces administrations par un retrait des pays que nous occupons, sans installation de bases permanentes. Si ce point nous rapproche du programme des libertariens et de Ron Paul, nous avons un important désaccord. Quand ils veulent un pur retrait, nous tenons à affirmer notre responsabilité quant au destin de ces pays que nous avons injustement occupés. Nous devons les aider à se développer car nous sommes responsables de ce qui leur arrivé. Des centaines de milliers de personnes sont mortes par notre faute : nous avons une dette à leur égard.

Qu’est-ce qui doit être fait au niveau mondial pour lutter contre la crise financière et économique ?


Concernant la crise financière et économique, nous devons donner une voix à tous les pays, et pas seulement aux huit ou vingt les plus importants. Je ne sais pas quel sera le contenu des différents sommets qui auront lieu dans les prochains mois, mais ils doivent prendre en compte l‘avis de tous les pays, et pas seulement des plus puissants. Un G8 ou un G20, pourrait, à tort ou à raison, paraître comme une conspiration des puissants contre les faibles.

Propos recueillis et traduits par Nicolas Condom, pour LaTéléLibre.fr.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.