Le Laacher See, comme le Pariou représenté sur les bouteilles d’eau Volvic, fait partie d’un type de volcanisme que l’on appelle volcanisme monogénétique basaltique.
Définitions :
Basaltique, en référence au type de magma produit par la fusion partielle des roches du manteau. Cela implique une source profonde et une remontée rapide du magma, sans interaction prolongée avec la croûte terrestre, afin de ne pas altérer sa composition.
Dans le cas du champ volcanique de l’Eifel, où se trouve le Laacher See, la source magmatique est située à au moins 30 km de profondeur. À titre de comparaison, pour le champ volcanique d’Auckland, en Nouvelle-Zélande, elle se situe à environ 90 km.
Monogénétique, car chaque éruption produit en général un seul édifice volcanique. Des études récentes montrent que dans certains cas, plusieurs éruptions peuvent avoir lieu, mais à des intervalles très courts (quelques dizaines à quelques centaines d’années).
Ces volcans diffèrent des volcans polygénétiques (comme le Pinatubo, l’Etna ou le Vésuve), qui se forment suite à plusieurs éruptions successives au même endroit ou presque.
À l’échelle locale, l’ensemble des volcans monogénétiques constitue ce que l’on appelle un champ volcanique monogénétique. Le terme peut prêter à confusion : bien que chaque édifice soit monogénétique, le champ, lui, est polygénétique à l’échelle du temps géologique, car il produit de nombreuses éruptions réparties dans l’espace et le temps (sur plusieurs millions d’années). Chaque nouvelle éruption crée un volcan à un endroit différent dans le champ.
Pourquoi y a-t-il autant de petits volcans dans un champ volcanique (>100 dans l’Eifel ou dans la Chaîne des Puys), au lieu d’un ou deux grands édifices ?
Plusieurs facteurs sont supposés contrôler ce type de volcanisme :
- une source magmatique capable de libérer du magma en plusieurs points,
- la présence de fractures dans la croûte, qui guident la remontée du magma,
- la topographie,
- le champ de contraintes tectoniques,
- ou encore des hétérogénéités thermiques ou lithologiques.
Il n’y a vraisemblablement pas un seul contrôle dominant, mais un ensemble d’influences plus ou moins importantes selon les régions.
Un maar est un cratère formé par une éruption phréatomagmatique, comme le Gour de Tazenat ou le lac Pavin dans la Chaîne des Puys.
Ce type d’éruption résulte de l’interaction entre un magma basaltique très chaud (~1000 °C) et de l’eau souterraine (nappe phréatique à ~10 °C), provoquant une explosion souterraine violente. Le cratère qui en résulte se remplit ensuite d’eau pour former un lac.
Une nouvelle éruption d’un volcan monogénétique comme celui-ci est peu probable : par définition, une fois l’éruption terminée, l’édifice n’est plus actif. L’éruption survenue il y a ~12 000 ans ne signifie donc pas qu’un nouveau cycle recommencera dans 12 000 ans.
L’éruption du Laacher See, en revanche, est un cas complexe. Elle s’est distinguée par :
- un volume de magma exceptionnellement élevé pour un volcan monogénétique,
- une composition évoluée du magma,
- et des processus phréatomagmatiques et non phréatiques impliqués.
Des travaux récents (cf. Geology, 2011) montrent que ce type d’éruption pourrait remettre en cause certains aspects de la définition stricte du volcanisme monogénétique.
Plus de recherches sont nécessaires pour comprendre comment une telle éruption a pu émerger dans un champ théoriquement constitué de petits volcans à vie courte.
Le champ volcanique de l’Eifel est divisé en deux sous-champs :
- Eifel Ouest : début d’activité vers 700 000 ans,
- Eifel Est : début vers 460 000 ans.
Le champ Ouest présente une récurrence moyenne d’environ 3,5 × 10⁻⁴ éruptions/an, soit une éruption tous les ~2857 ans. Or, aucune éruption n’a été enregistrée depuis environ 11 000 ans.
Cela soulève des questions, car ces systèmes restent mal compris : il est donc difficile de prédire s’ils sont vraiment éteints ou simplement en sommeil.
En résumé :
- La source mantellique est probablement toujours active.
- Une nouvelle éruption est possible, mais on ne sait ni où ni quand elle surviendra.
- Elle produira un nouveau volcan dans le champ, à un emplacement inédit.
- Elle a très peu de chances d’atteindre l’ampleur de celle du Laacher See. Le volume moyen d’une éruption monogénétique dans le monde est inférieur à 1 km³.
Bref, tout ça pour dire que certains journalistes devraient réfléchir un peu plus avant d’écrire des papiers anxiogènes à leur retour de vacances…
Et pour les passionnés, voici un peu de lecture complémentaire !
ftp://ftp.ingv.it/pub/jacopo.taddeucci/PAPERS/Libri%20springer/Mantle%20plumes/cap8.pdf
http://www.chainedespuys-failledelimagne.com/