S'abonner ?
Tu sais, tout le monde n'a que ce mot-là à la bouche en ce moment. A toi pour qui les évènements de janvier 2015 seront dans les livres d'histoire, nous nous battons pour défendre notre liberté. Quelle sera-t-elle cette liberté lorsque tu seras en âge de lire ces lignes ?
Est-ce que ces milliers de "nouveaux" lecteurs l'auront sauvé, cette liberté ? Tu le sais, à la maison, il y a toujours des livres, des journaux. Et dans le mouvement populaire, nous nous sommes abonnés. C'est notre manière de défendre la liberté d'expression. Que pouvons-nous faire d'autres ?
Il y aura bien des gens pour vouloir s'investir partout. Mais pour combien de temps ? Alors lire les journaux, en tout cas quelques uns, c'est déjà quelque chose, à notre petit niveau. On les a toujours lu, mais désormais, on va s'y astreindre davantage. Oui ça peut paraître étrange, d'employer le mot "astreindre", mais même si l'habitude existe, la régularité hebdomadaire sera nouvelle, exigeante. Si l'abonnement signifie laisser les journaux s'amonceler dans un coin, tout en ayant bonne conscience, cela n'aura aucun sens. "Ah, oui, oui, on est abonné, bien sûr !" Il y en aura des tas, c'est sûr. Mais c'est la lecture qui importe.
On ne va pas tout changer du jour au lendemain. Tes parents lisent régulièrement Médiapart, Charlie, Libé, le1, le Canard Enchainé, le Monde un peu, l'Obs et l'Express sur le web, et bien d'autres encore - satané internet, si chronophage. Mais bon, on bosse aussi ! Je veux bien tout acheter - dans la mesure de nos moyens - mais le temps va nous manquer !
Donc, être un peu logique avec notre mode de vie. Charlie, c'est l'évidence, le déclencheur, la raison de notre émoi, et la poursuite d'une habitude, même un peu distendue (comme déjà dit dans notre premier billet). Médiapart, on le lit déjà. Et puis le1. C'est aussi un hebdo, que nous aimons beaucoup, de par l'originalité du traitement des informations. Un quotidien, régional ou national de temps en temps, et ça ira comme ça.
C'est peu... C'est déjà beaucoup pour nous. Tu noteras que si beaucoup s'y mettent, la presse est sauvée... Oui, il ne faudrait pas oublier cet aspect. La presse va mal, qu'elle soit hebdo ou quotidienne. Alors si un grand nombre se réintéresse, les choses peuvent changer. Sans doute. Ou pas...
Charlie était en déconfiture depuis des mois. C'est cynique, mais je pense que leurs problèmes financiers vont se régler. Grâce à nous. La question qui demeure et qui se posera est : pour combien de temps ? Qu'en sera-t-il dans 6 mois, dans un an ? Peut-être même plus rapidement, si ça trouve. On passe si vite d'une info à une autre. Quand la vie aura repris son cours, que se passera-t-il ? "Ah oui, Charlie, c'est vrai. C'était quand déjà ?"
Tu sais, j'espère ne jamais entendre cette phrase. Mais ton négativiste de père n'y croit pas trop. Quand reviendra le printemps s'envoleront les grands principes pris dans l'urgence du choc. A moins que... Tu me le diras sur notre banc.
"Et entendre ton rire
qui lézarde les murs
qui sait surtout guérir
mes blessures"