Le débat sur le nucléaire ne semble pas dépasser le cercle de l’hémicycle : les élus de la république n’ont visiblement pas l’intention de demander l’avis éclairé de la population. C’est un non-sujet médiatique et ce n’est pas nouveau. Pourtant, autant dans son acceptation civile comme militaire, le nucléaire est un non-pensé du débat démocratique. Pourtant les arguments qui le contestent n’ont pas pris une ride.
Prenons d’abord le nucléaire civil. L’électricité nucléaire continue d’être une électricité chère, anti-démocratique, non durable, dangereuse et infiniment polluante.
Chère car elle n’en finit pas d’exploser ses coûts de développement, qui n’apparaissent pas pas clairement sur la facture des usagers, mais se paient depuis six décennies grâce aux impôts des contribuables. Même outrageusement subventionnée, l’électricité nucléaire n’arrive pas à concurrencer le solaire et l’éolien.
Anti-démocratique car depuis sa genèse le nucléaire civil a été imposé par un État militarisé qui considère le citoyen comme un imbécile incapable de comprendre les « merveilleux » avantages qui en découlent. Les luttes des années 70, si elles ont parfois obtenu gain de cause, n’ont pas changé la donne : la propagande étatique préfère nous habituer à la possibilité d’un accident majeur plutôt que nous demander notre avis sur les alternatives potentielles, en termes de production ou de consommation.
Non durable, car c’est une énergie fossile, dont la ressource est épuisée en France et limitée ailleurs. Elle nous rend dépendants de pays comme la Russie, le Niger (dans une optique post-colonialiste maintenant rejetée par les pouvoirs locaux), ou du Kazakhstan par exemple. Autant dire que l’indépendance énergétique de la France ne passe certainement pas par le nucléaire. Les stocks d’uranium ne sont pas infinis à l’échelle planétaire, et imaginer par exemple de décarboner la production d’énergie mondiale par le nucléaire est un non-sens absolu.
Dangereuse, l’électricité nucléaire l’est à plusieurs titres. Depuis une vingtaine d’années, les acteurs du nucléaire n’essaient plus de nous convaincre que, contrairement aux autres puissances nucléaires, nous sommes à l’abri d’un accident majeur de type Tchernobyl, Fukushima ou pire encore. Comme le Canard Enchaîné l’a révélé depuis longtemps, il s’agit plutôt d’habituer la population à l’inévitable : l’accident majeur aura bien lieu, un jour ou l’autre. Cultivons notre résilience à cette éventualité. Quant aux déchets nucléaires, le stockage en surface comme à La Hague ne suffisant plus, nos élites s’accrochent à un stockage souterrain à Bure dont tout le monde sait qu’il sera une bombe à retardement pour les générations futures, menaçant un bassin hydrologique grand comme le quart de la France. Et ne parlons pas du démantèlement des vieilles centrales nucléaires, personne ne sachant comment le mener (on ne saura probablement jamais) , autre cadeau empoisonné pour les générations futures.
Infiniment polluante, je viens de l’évoquer mais surtout car elle nous éloigne de l’essentiel pour survivre au dérèglement climatique et à l’extinction de masse. Elle véhicule et conforte la doctrine consumériste de l’économie capitaliste. Produire et consommer toujours plus, qu’elles qu’en soient les conséquences. Elle tue définitivement la seule voie qui permet à l’humanité de se survivre à elle-même : une sobriété choisie qui se concentre sur nos besoins essentiels et déconstruit notre imaginaire pollué par l’individualisme au détriment de la solidarité et de la fraternité.
Il est grand temps que les citoyens prennent en charge leur politique énergétique en l’adaptant à leurs vrais besoins et en la décentralisant à tout point de vue pour échapper à un étatisme autoritaire et fascisant.