Détruire une oeuvre d'art est bien sur un comportement totalement intolérable. N'est-ce pas encore pire quand ce vandalisme se fait au nom de la foi, contre "une oeuvre blasphématoire" ? Mgr Jean-Pierre Cattenoz exigeait le retrait de "cette ordure", une manifestation rassemblant des centaines de personnes avait été organisée samedi dernier devant l'exposition "je crois au miracle".
Cette histoire est d'autant plus navrante qu'à l'intolérance se mêlent une profonde inculture. En effet, ceux qui ont crié à l'offense ne se sont pas même pas intéressés à la démarche de l'artiste.
En 2008, le Centre Pompidou avait exposé cette oeuvre dans l'exposition Traces du sacré. Jean de Loisy, qui était le commissaire de l'exposition, nous expliquait alors que l'oeuvre d'Andrés Serrano était en fait "un poème sur l'incarnation".
"Serrano a la sensation que ce qui caractérise et qui donne la lumière du Christ, c'est son incarnation (...) Lorsqu'il a plongé le crucifix dans un bain d'urine et de sang, il le plonge dans ce qui caractérise l'homme : le Christ est infiniment homme comme on le sait quand on s'intéresse à l'histoire du christianisme. Donc en faisant cela, il lui donne une lumière sublime, et cette lumière est dans l'esprit de Serrano beaucoup plus une prière qu'une offense."
Extrait du film Offense réalisé par Nicolas Valode et Pauline Cathala pour la Daca / Centre Pompidou en 2008.