Sarkozy et la morale
Sarkozy et son gouvernement n’ont de leçons de morale à recevoir de personne, même pas du Pape. Devant les oppositions de plus en plus nombreuses, y compris à droite, aux expulsions des Roms, il fait rappeler par ses chiens de garde habituels la Séparation de l’Etat et des Eglises. Pourtant en janvier 2008 à Rome, il a déclaré devant les l’ensemble des cardinaux (ce sont eux qui élisent le Pape), que sur les valeurs morales, le prêtre était imbattable, au top niveau que jamais n’atteindra l’instituteur. L’instituteur… ! la bête noire du gouvernement de Vichy, l’ennemi intérieur le plus dangereux , pire que le juif dont au moins on connaît la dangerosité, parce que lui corrompt depuis longtemps la jeunesse française sous prétexte de lui apprendre à lire et à calculer, et pire que tout, de lui enseigner l’histoire de France. En opposant l’instituteur et le curé (accompagné du rabbin et de l’imam) sur le plan des valeurs morales, Sarkozy réhabilitait déjà un des thèmes phares de Vichy. Avec l’expulsion des Roms, la déchéance de nationalité pour les délinquants étrangers ou d’origine étrangère, en passant par le débat national sur l’identité nationale, il met en application les promesses de Latran ; il montre que la morale qui inspire ses projets et ses actes est bel et bien la morale vichyste.
Contrairement à ce qu’on dit, Sarkozy tient rigoureusement ses promesses, en tout cas sur le plan des valeurs morales de la France. L’ennemi de l’intérieur n’est plus « la juiverie et la ploutocratie internationales » devenue une grande amie, mais le fond de l’argument est rigoureusement le même : La France n’a pas de leçons de morale à recevoir de l’extérieur ; car, rappelons le, contre l’histoire de France racontée par Sarkozy, Vichy n’était pas seulement un régime de collaboration avec l’ennemi, son idéologie et sa politique avaient des racines beaucoup plus anciennes que le national-socialisme allemand. La preuve en est que le gouvernement n’a pas attendu les demandes de « l’extérieur » pour déclarer le Statut des Juifs. Avec Sarkozy, on est bien dans le nationalisme de l’Action Française. L’autre point de ressemblance est le mépris des organisations internationales « droits-de-l’hommistes », un néologisme souvent utilisé par Sarkozy pendant sa campagne présidentielle pour une « droite décompléxée ». Pas de leçons de morale à recevoir du Conseil de l’Europe, ni du Comité contre la discrimination de l’ONU, et depuis hier, même pas du Pape pourtant garant des seules valeurs qui vaillent, celles du « sacrifice de soi et le sens de l’infini »(Discours de Latran, janvier 2008) Du reste, dans sa politique économique et sociale, Sarkozy reste également persuadé de la valeur morale du sacrifice de soi, par exemple pour les retraites tant qu’il ne concerne pas le boucler fiscal. « Pour une droite décomplexée » est bel et bien le mot d’ordre de l’Etat sarkozien, car il existe en France une droite « complexée » par le passé vichyste de l’Etat Français et par le passé colonial de la République française. En 2007, c’est Chirac qui était visé, lui qui avait publiquement dénoncé le régime français de Vichy.
Cette inspiration vichyste de Sarkozy avait été très tôt dénoncée et analysée par le philosophe Alain Badiou (De quoi Sarkozy est-il lenom ? ) Mais comme Badiou a été maoïste dans sa jeunesse, personne n’a tenu compte de l’avertissement. C’est dommage car 3 ans après son accession à l’Elysée, Sarkozy montre régulièrement et avec constance à quel point les valeurs de Vichy sont les siennes.