Tendre et courtois armistice
Laisse-moi bercer ta tristesse, mon amour, comme autrefois, d’un baiser sur ton front soucieux, comme ta mère adorée sut bercer tes chagrins d’enfant en te chantant des chansons.
Oublions les mots-torpilles, les laides explosions, les cris de guerre et de colère qu’après avoir pris d’assaut nos cœurs agités, aigris par l’âge, l’hiver, et les temps troublés, les démons nous ont soufflés à l’oreille, quand il eût fallu des mots d’amour et de tendresse, des paroles douces comme promesses d’azur ou caresses sur le cœur, ceux que nous savions si bien inventer l’un pour l’autre, en nos années de jeunesse. Ils nous rendaient plus forts contre le présent hostile, les méchants et les jaloux, ils nous aidaient à espérer des lendemains ensoleillés alors que tout autour de nous, la faim, la misère, la mort, la maladie, la haine distribuaient à nos semblables leur lot de souffrances en veux-tu en voilà, sur toute la terre.
Ils naissaient alors sur nos lèvres comme bourgeons fleuris sur les pommiers chaque avril, comme lais de troubadours chantant la fin’amor et la beauté des gentes dames en leur plus haute tour, comme rayons de soleil illuminant la plaine dès l’aube, comme voiles blanches apparues à l’horizon de l’océan étale, comme souffle de zéphyr parfumé les soirs d’été dans les allées de roses, comme trilles de rossignol au cœur de la nuit étoilée. Nous avions conquis un royaume de beauté.
Désormais, nos lendemains seront comptés, les beaux jours se feront rares, mais le pardon, lueur d’espoir au fin fond d’un ciel opaque, apaise la mémoire, il faut résolument y croire. La grâce de l’amour agit comme un puissant remède sur toute blessure.
1er septembre 2021