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Nicole Péruisset-Fache

Professeure agrégée honoraire, Docteure de l'Université de Rouen, Qualifiée aux fonctions de maître de conférences, Chercheure en sciences humaines indépendante, poète à ses heures

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Billet de blog 20 août 2021

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Poème des 19-25 mars 2009

Le Printemps, tout sourire, vagabondait sur les chemins de terre, foulant les mille fleurs des talus, gambadant sur les sentes des bois clairs, folâtrant dans les prairies hersées, traversant les champs emblavés, enjambant les ruisseaux babillards que chez nous on appelle « becs » depuis l’âge scandinave, pataugeant dans les gués, dansant dans le vent  frais de mars en fredonnant ses ritournelles.

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Le jour des sept douleurs

Le Printemps, tout sourire, vagabondait sur les chemins de terre, foulant les mille fleurs des talus, gambadant sur les sentes des bois clairs, folâtrant dans les prairies hersées, traversant les champs emblavés, enjambant les ruisseaux babillards que chez nous on appelle « becs » depuis l’âge scandinave, pataugeant dans les gués, dansant dans le vent  frais de mars en fredonnant ses ritournelles.

Aux commandes de ton avion, là-bas, tu songeais ; le moteur bourdonnait au-dessus du Bocage radieux.

Royal et sans pitié, le soleil plongea soudain sept glaives d’airain au plus profond de mon cœur. Entre toi et moi, venait de s’ouvrir, béant, l’insondable gouffre du temps qui passe et ne reviendra pas. Surgirent alors en rangs serrés, menaces de l’éternité, un silence sidéral, l’absence abyssale, le néant tous azimuts à perte de vue. Je demeurai sans réaction et sans parole.

Incrédule, je découvris que le ciel, bleu de banquise, s’était brutalement vidé de toutes nos attentes, de toutes nos espérances. Tous nos rêves s’étaient enfuis à tire-d’aile. Ton image allait disparaître à tout jamais de l’horizon que tu venais de me révéler et, sans Toi, je redeviendrais silhouette incertaine de femme aux sept douleurs.

Le lendemain, dès l’aube, vers le sud, les étoiles me questionnèrent, il me fallait rendre des comptes. Qu’avais-je  fait du bel amour offert ? De galaxie en galaxie, elles prononcèrent ton nom jusqu’aux confins de l’univers. Sans cesse, elles le murmureraient et me parleraient de Toi désormais.

Mon cœur, déjà  à feu et à sang, reçut une nouvelle volée de banderilles et je sus que j’avais dépouillé ma vie du sens ultime. Ma joie d’être, je l’avais crue mon œuvre, je ne tenais ce trésor que de Toi, et il était trop tard. Une colère injuste avait aboli notre rencontre miraculeuse.

Les dés avaient été jetés. Ils s’étaient égarés parmi les années-lumière. Des larmes perlaient à mes paupières, que je ne pouvais retenir. L’amour gisait, inerte, par ma faute, sous la poussière du cataclysme. Le Printemps avait pris le ténébreux voile du deuil.

J’implorai ton pardon.

Tu arrivas et me serras dans tes bras.

                                19-25 mars 2009

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