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Nicole Péruisset-Fache

Professeure agrégée honoraire, Docteure de l'Université de Rouen, Qualifiée aux fonctions de maître de conférences, Chercheure en sciences humaines indépendante, poète à ses heures

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Billet de blog 21 janvier 2023

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Mes images de Toi

Au fil des années, j’avais inventé de si belles images de toi ! Lumineuses, douces, tendres, généreuses, à jamais gravées dans mon cœur blessé de toute éternité, celui des amantes de légende.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Mon bien-aimé, pour moi, est un sachet de myrrhe : entre mes seins, il passera la nuit.Mon bien-aimé, pour moi, est un rameau de cypre parmi les vignes d’Enn-Guèdi.Ah ! Que tu es beau, mon bien-aimé : tu es la grâce même ! La verdure est notre lit ;les cèdres forment les poutres de notre maison et les cyprès, nos lambris. Comme un pommier entre les arbres de la forêt, ainsi mon bien-aimé entre les jeunes hommes. J’ai désiré son ombre et je m’y suis assise : son fruit est doux à mon palais. Il m’a menée vers la maison du vin : l’enseigne au-dessus de moi est « Amour ».Soutenez-moi par des gâteaux de raisins, fortifiez-moi avec des pommes, car je suis malade d’amour

 Sur mon lit, la nuit, j’ai cherché celui que mon âme désire ; je l’ai cherché ; je ne l’ai pas trouvé. Oui, je me lèverai, je tournerai dans la ville, par les rues et les places : je chercherai celui que mon âme désire ; je l’ai cherché ; je ne l’ai pas trouvé. Pose-moi comme un sceau sur ton cœur, comme un sceau sur ton bras. Car l’amour est fort comme la Mort, la passion, implacable comme l’Abîme : ses flammes sont des flammes de feu, fournaise divine.

                                      Cantique des Cantiques

Mes images de Toi

Au fil des années, j’avais inventé de si belles images de toi ! Lumineuses, douces, tendres, généreuses, à jamais gravées dans mon cœur blessé de toute éternité, celui des amantes de légende. Partout, ton image adorée m’accompagnait, icône d’or de ma ferveur pour mon idole. C’était comme si tout mon être vivait pour toi depuis la nuit des temps, depuis la longue traversée du néant d’avant ma naissance, comme si ton être vivait en moi depuis bien avant ta venue au monde. Je me croyais destinée à Toi, je te croyais destiné à moi. Etait-ce un songe ?

Ma vie n’avait d’autre importance que celle de t’aimer, de voir en Toi Celui dont j’avais toujours rêvé, de te consacrer mon temps, priant pour toi comme Carmélite en son couvent, balbutiant des poèmes pour te célébrer et faire de toi l’Amant éternel, dieu immortel de mon cantique. Chaque seconde de ma vie fut et reste offrande pour l’amour de ton être. Chaque seconde de l’attente, torture infinie jusqu’à ton retour espéré. Chacun de tes retours, explosion de joie secrète dans mon cœur bondissant, tel un chevreau exultant de liberté. Ta présence était toujours pour moi merveille sans pareille, plus rayonnante que le soleil ardent, plus joyeuse que les plus riantes saisons de l’année, plus précieuse que les Très Riches Heures des seigneurs du passé. Tu ne le voyais pas.  Nous ne regardions déjà plus ensemble dans la même direction.Tu regardais ailleurs. 

En ta présence, je devenais fleur, roseau, colombe, source vive, parfum, chanson, pour t’entourer de beauté. En ta présence, je devenais toutes les Eve de toutes les Bibles. Je ne devais qu’à Toi la splendeur du jour, l’émerveillement devant le ciel étoilé, devant la mer immense aux vaguelettes vertes sous la brise. Je ne devais qu’à Toi la saveur du pain quotidien, du vin de la treille, des pommes du verger et des cerises mûres. Tu étais l’eau fraîche qui désaltère, l’eau dont j’avais si grande soif, l’eau indispensable à ma vie. Je n’avais d’autre raison d'être que l’Homme que tu étais pour moi, mon amour, mon époux,  mon dieu, mon roi. Je te donnais sans compter TOUT ce qui était à moi. Sans Toi, les jours me paraissaient interminables, inutiles et moroses. Loin de Toi, chagrines, les roses n’avaient plus que des épines, je n’en voyais plus les pétales de couleur, je n’en sentais plus la suave odeur. Mon âme, mon corps, n’étaient plus que triste langueur, brûlant de la fièvre et du mal de Toi.

Sans Toi, aujourd’hui, je n’ai plus envie de vivre. Désormais seule, il me tarde de dormir dans mon linceul pour l’éternité des temps à venir, je n’ai que trop pleuré, trop adulé ton être dans la nuit noire de ton indifférence, trop désespérément aimé un Absent au long cours qui a fini par m’abandonner. Sans Toi, plus rien n’existe sinon cette épuisante marche sans but dans les sables d'un désert sans nom, plus rien n’existe sinon l’écrasante solitude d’une existence sans raison d’être.  

Tu as donné à une étrangère de passage ce que de Toi j’aimais à la folie. Les versets de mon texte sacré, mes chants d’amour, les larmes de mon chagrin n’éveillent aucun écho en ton cœur d’obsidienne, pour toi je ne suis plus rien, tu m’as impitoyablement exilée, bannie de ton présent, bannie de ta mémoire, bannie de cette existence qui est tienne. Le monde ne m’est plus que ténèbres de l’ennui et  désespérance. Qui me rapportera la lumière ?

21 janvier 2023 Aimée Saint-Laurent © Chants des noces

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