Ode au soleil
Soleil ardent, qui te lèves si chichement sur le village normand et son église, quand tu verses ta lumière au-dessus de la forêt le matin et illumines mes journées solitaires, je te vénère, pareille aux anciens Egyptiens.
Rê, bienfaiteur de la somptueuse vallée du Nil, toi qui donnes aux champs de l’Egypte ce vert végétal éclatant, ondulant sous le vent, et honores le blanc aveuglant des galabiehs de pauvres paysans à l’ouvrage, tout le long des eaux saphir qui dansent et miroitent, sous un ciel bleu indigo uniformément, Rê, tu fus autant adoré que l’époux en d’autres temps si aimant vers qui volent mes prières.
Soleil ardent, qui te lèves si chichement sur le village normand et son église, tu as beau essayer de faire éclore mon sourire, celui qui s’en est allé l’a emporté dans ses bagages. Tu ne peux désormais qu’assécher un peu les larmes sur mon visage.
Soleil ardent, qui rayonnes sur le globe, je croyais pouvoir te dérober une étincelle et offrir à celui que j’aime, la gaieté dont les fées m’avaient dotée quand je suis née. Ma joie de vivre s’est assombrie comme lorsque tu disparais loin au-delà des nuages et c’est le chagrin qui m’aveugle aujourd’hui.
Rê, tu n’entends plus les chants psalmodiés de tes prêtres servants. Les millénaires ont enfoui les temples sous les sables et, au passage d’étrangers, les signes de leurs murs de pierre restent muets, s’effritant avec le temps.
Soleil ardent, pareil à l’amour sauvage que mon cœur ressent pour l’absent, tu brilleras encore longtemps pour les peuples et les poètes à venir, éclairant la beauté du monde et, sans pitié, ses multiples, éternelles, horreurs.
Tu dessècheras aussi mes os et les fleurs parfois laissées sur ma tombe.
31 août 2021