Sur le petit livret d’accompagnement, très classe, pose une imitation jeune de Dick Rivers. Qui semble effectivement détendu. Mais est-ce vraiment du mobile ?
C’est lâche un téléphone portable. Un beau matin, plus de son, plus d’images (plus de contacts non plus d’ailleurs). Vous pensez immédiatement « recharger » ? Et l’écran reste obstinément noir. Vous accusez la prise. Votre nouveau compteur électrique. Vous vérifiez les plombs. Puis vous téléphonez. Et là : sentence immédiate : « Mais, Madame, je vois, je vois sur mon ordinateur que votre portable a déjà deux ans ! » Vous pensez que c’est une promotion anniversaire. Mais que nenni ! C’est une culpabilisation directe. La phrase qui suit le prouve : « Il est grand temps d’en changer. Mais essayez tout de même votre carte SIM sur un autre portable ». Quel autre portable. Vous avez déjà un fixe, un ordi, un fax, internet, vous ne faites pas collection……………..
Puis tombe le mail fatidique. Celui qui vente les promotions du mois d’août. Et là, vous le voyez. Il est tout blanc. Il est tactile en plus. Le rêve. Il ne coûte quasi rien si vous prenez le forfait (qui lui coûte quelque chose !)
Entre temps, vous avez emprunté un vieux portable d’une copine pour lui glisser votre carte SIM, histoire de récupérer les numéros principaux. Dommage. Vous avez tous les numéros de votre copine. Aucuns des vôtres. Tous ses messages. Aucuns des vôtres.
Alors va pour le tactile.
Qui fait tout : il photographie, il filme, il enregistre, il vous dit où vous êtes (utile), imprime votre réseau social et note vos rendez-vous. Vous vous lancez. Cela s’appelle un achat d’impulsion.
Le colissimo est arrivé. Vous avez blagué avec la postière. Genre « Pas de soucis, j’en ai pour la journée à paramétrer mon nouveau portable » Vous dites d’ailleurs « mobile phone », ainsi personne ne vous comprend.
Dans le carton, il y a une boîte et dans la boîte : la merveille : blanche et tactile.
Vous vous munissez du guide de l’utilisateur. Carte SIM, batterie. Glisser le couvercle, merci. Tout va bien. Reste juste à le mettre en charge. Vous piétinez. Pressée de découvrir ses multi fonctions. Vous n’avez pas fini de piétiner………
Voilà. Il est détendu, le mobile. Vous, vous êtes un peu crispée. Vous glissez votre pouce droit sur son bel écran pour choisir la langue, et vous appuyez sur « Deutsch ». Les icônes en allemand, même pour une seconde langue, c’est impossible à déchiffrer. C’est aussi impossible à retrouver la manipulation pour indiquer : « Français ». Vite, le service Client. Après « étoile » votre numéro « l’ancien, bien sûr », faites le 1, le 2, le 3 et confirmer par « dièse », une charmante voix vous demande l’autorisation de vous appeler par votre prénom et s’empresse de vous préciser le sien. Vous expliquez vos icônes en langue germanique. Et là, tout se gâte : « Mais c’est du ressort du service technique ! »
Pendant 15 minutes, une voix métallique vous dit alors que vous n’avez plus que 5 minutes à attendre pour parler à un technicien. Re-prénom, si cela ne vous ennuie pas (ce n’est pas le pire dans le cas présent) : « On va trouver une solution. Il faut dé-paramétrer ( ?) et tout remettre à zéro. Vous voulez bien. Vous êtes prête à tout. « Rentrer les chiffres suivants ». La première formule cabalistique ne fonctionne pas. On vous en donne une seconde. Et merveille : ground zero.
Vous vous promettez d’avoir désormais le pouce plus léger et de trouver le mot « français » avant d’appuyer. Et vous passez l’épreuve avec mention.
Phase suivante : activer votre nouvelle ligne. Avec le numéro de la commande à taper sur les touches du téléphone (oui, vous avez rappelé un autre numéro indiqué sur une autre lettre). Et surtout, surtout le code pin. Qui n’a que 13 chiffres. Pas grave. Vous n’êtes pas superstitieuse. Puis…….. plus rien. Il faut attendre l’activation.
Qu’importe ! Vous avez tellement de fonctions à découvrir…….
Mais quatre heures plus tard, vous n’avez toujours pas de nouveau numéro.
Vous rappelez. Et donnez tout de suite votre prénom pour simplifier. En indiquant timidement « j’ai demandé à garder le même numéro ». Une charmante voix répond : « C’est tout à fait possible ». Une heure plus tard, quand vous appelez le dit numéro de votre fixe, c’est le portable de la copine qui sonne.
« Demain sera un autre jour ». A 7 heures, les chats bondissent. Vous aussi. Vous aviez activé le réveil. C’est cela un portable d’homme d’affaires. Encore quelques minutes…….. Mais à 7 h 10, le même son strident à base de cris de coqs effrayés vous perce les oreilles. Intelligent, pensez-vous, pour ceux qui se rendorment. Vous trouvez cela moins intelligent quand à 7 h 20…………..
Le problème du numéro n’est toujours pas réglé. Vous aurez épelé tous les prénoms de la terre. « Mais, c’est tout simple, dit une nouvelle voix, moi, je l’ai votre nouveau numéro. On ne peut jamais garder l’ancienne ligne !» La bande annonce vous a demandé de rester zen et vous obtempérez. « Je vais vous le donner mais il faudra parler avec un technicien pour le paramétrer ». Là, vous commencez à haïr le blanc, l’écran, le tactile et le détendu du mobile.
Et puis : miracle : vous pouvez enfin appeler votre fixe de votre portable. Demi-miracle car vous ne pouvez pas appeler votre portable de votre fixe car vous avez un répondeur qui vous dit que vous n’êtes pas là. Avec l’ancienne annonce que vous vous souvenez avoir enregistrée. Vous pensez détruire l’ancienne carte SIM : la brûler, la déchiqueter. Vous l’aviez d’ailleurs extraite, par précaution, du portable de la copine.
Mais vous optez pour un dernier appel. Fatidique ! Le côté Club Med, prénom et enquête de satisfaction vrille vos nerfs. La réponse est bien pire « Nous ne pouvons rien faire. Cet ancien numéro mourra de lui-même dans six mois ». Vous essayez vainement d’expliquer que des gens vont tenter de vous joindre et tomber régulièrement sur le répondeur. Mais c’est ainsi. Une réalité de la vie. Il faut attendre six mois pour que meure l’ancienne carte, officiellement du moins. « Et si je la détruis ? » hasardez-vous. « Je crains que cela ne change rien » répond Hortense ou Agathe.
Dans votre philosophie de la vie : « Il y a toujours pire ». Vous vous dites que vous avez progressé. Vous pouvez appeler et être appelée. Sauf que……… personne ne connaît votre nouveau numéro. Et que les numéros importants étaient enregistrés directement sur le portable qui gît par le fond. Qu’importe ! La fortune sourit aux audacieux. Vous allez restructurer tout cela. Parce qu’après tout, il n’y a aucune raison que vous aussi vous ne soyez pas une « détendue du mobile ».
Liliane Langellier